Sous la surface : l’étonnant rôle des nématodes

Soft Secrets
21 May 2025

Les nématodes sont des vers ronds microscopiques appartenant au phylum Nematoda. Bien que simples en apparence, ils se révèlent étonnamment diversifiés et jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes terrestres et aquatiques. Recycleurs de nutriments, auxiliaires agricoles ou encore parasites destructeurs, leur impact est colossal et pourtant invisible. Présents depuis plus de 400 millions d’années, ces maîtres discrets des sols illustrent une fascinante dualité pour nos jardins, entre alliés insoupçonnés et ennemis redoutables.


Par Hortizan 

Les nématodes règnent sur le monde invisible.

Avec 57 milliards de nématodes pour chaque être humain, ils dominent en nombre et en poids. Ils représentent 82 % du poids combiné de tous les animaux terrestres. On les trouve dans des habitats variés : Ils prospèrent dans les glaciers de l’Antarctique, colonisent des déserts arides jusqu’aux sols les plus profonds. On les retrouve même dans des milieux extrêmes comme Mono Lake. Ce lac de soude situé en Californie, connu pour sa forte concentration d’arsenic et ses formations minérales uniques, abrite des espèces de nématodes capables de survivre à ces conditions hostiles, pourtant fatales à la plupart des organismes.

Cette domination s’accompagne d’une diversité remarquable. On estime qu’il existe entre 40 000 et 500 000 espèces de nématodes, dont une grande partie reste inconnue (Kiontke et Fitch, 2013). Les nématodes se sont adaptés à une grande variété d’environnements, grâce notamment à leur régime alimentaire extrêmement diversifié. Selon leur espèce, ils consomment des bactéries, des champignons, des protozoaires, des cellules végétales, des insectes, des algues, des débris organiques, des nutriments dissous ou même d'autres nématodes. Certains sont également parasites d’une multitude d’organismes, d’animaux ou d’insectes, humains inclus. Le plus grand nématode, Placentonema gigantissima, évoluant dans le placenta des cachalots, peut mesurer jusqu’à 9 mètres. Certains nématodes sécrètent de l’azote par leur peau. D’autres portent une couche de bactéries "poilues", qui leur permet de vivre dans des milieux riches en soufre. Leur diversité et leur capacité d’adaptation font des nématodes des acteurs clés de la vie sur Terre.

Les nématodes jouent un rôle clé dans l’équilibre écologique.

Bien que microscopiques, leur contribution s’étend à des processus variés, allant de la purification des milieux à la régulation des chaînes alimentaires, en passant par le recyclage des nutriments.

Dans les sédiments marins, les nématodes participent activement à la détoxification des environnements. En se déplaçant, ils favorisent l’aération et le mélange des couches de sédiments, ce qui aide à libérer et à décomposer des composés toxiques tels que les sulfures ou l’ammoniac. Ces petits vers ne travaillent pas seuls : certains hébergent des bactéries symbiotiques capables de dégrader des substances nocives comme les hydrocarbures ou les métaux lourds, contribuant ainsi à purifier leur habitat. Les nématodes participent aussi au recyclage des nutriments essentiels. En digérant la matière organique et les microbes, ils libèrent des éléments tels que l’azote et le phosphore, indispensables à la croissance des plantes. Leur contribution au cycle global du carbone est notable : en favorisant la décomposition de la matière organique, ils interviennent dans près de 2 % de ce processus.

Dans nos systèmes agricoles, certains nématodes sont de précieux auxiliaires.

Les nématodes entomopathogènes, comme Steinernema spp., sont utilisés pour lutter contre les ravageurs des cultures. Ces nématodes, appliqués par pulvérisation dans les champs ou injectés localement dans le sol, offrent une alternative écologique aux pesticides chimiques. Ils infectent et tuent les insectes nuisibles, tels que les larves de coléoptères, les chenilles ou encore les mouches des fruits. Ces méthodes sont particulièrement efficaces dans les cultures maraîchères, les vergers ou les serres.

Malgré leur rôle écologique, d’autres nématodes sont de redoutables ennemis pour les cultures.

Les nématodes phytopathogènes, tels que Meloidogyne spp. (nématodes à galles), causent des pertes estimées à 10 % des cultures mondiales chaque année. Ces parasites s’attaquent aux racines, formant des excroissances tumorales qui perturbent l’absorption d’eau et de nutriments. Cela entraîne un affaiblissement général des plantes et réduit leur résistance au stress, notamment en période de sécheresse. D’autres nématodes, comme Xiphinema index, aggravent les dégâts en transmettant des virus aux végétaux. Ce dernier est le vecteur du virus du court-noué, une maladie grave affectant les vignobles.

Les changements climatiques amplifient ces effets destructeurs. En période de sécheresse, les populations de nématodes phytophages augmentent, tandis que celles des prédateurs diminuent. Cela crée un déséquilibre qui aggrave les dégâts sur les cultures, notamment dans les zones vulnérables aux aléas climatiques. Pour limiter les nématodes nuisibles, des solutions comme les rotations culturales, les plantes nématicides ou le biocontrôle avec champignons ou bactéries symbiotiques peuvent paraître prometteuses. Cependant, l’utilisation d’un large spectre de produits nématicides peut perturber l’équilibre fragile entre les espèces bénéfiques et nuisibles. Cette complexité rend indispensable une approche raisonnée pour protéger à la fois les cultures et écosystèmes.

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