Liriomyza : un ravageur sous nos feuilles

Soft Secrets
06 Jan 2025

Les mouches mineuses (Liriomyza spp.) sont de petits insectes diptères de la famille Agromyzidae, largement répartis à travers le monde. Mesurant entre 1 et 3 mm, les individus du genre Liriomyza sont souvent de couleur noire et jaune, avec des ailes claires et transparentes. Elles sont morphologiquement très semblables, ce qui rend leur identification difficile. Parmi les espèces les plus communes qui affectent l’Europe figurent Liriomyza huidobrensis, Liriomyza trifolii et Liriomyza bryoniae.


Par Hortizan

Le cycle de vie des mouches mineuses comprend quatre stades : œuf, larve, pupe et adulte. Les œufs, souvent invisibles à l'œil nu, sont insérés sous la surface des feuilles. Les larves, mesurant entre 2,5 et 3,5 mm, y creusent des tunnels caractéristiques pour se nourrir, générant ainsi des dommages considérables. Une fois leur développement terminé, les larves se transforment en pupes, souvent enfouies dans le sol, avant d'émerger sous forme d'adultes prêts à se reproduire.

Ces insectes préfèrent des conditions chaudes et humides, et arrivent à évoluer aussi bien en plein champ que sous abri. Ils se multiplient sur de nombreuses plantes hôtes, qui incluent le cannabis, les solanacées, ou encore les crucifères.

Les mouches mineuses causent des dégâts distincts selon leur stade de développement. Les femelles adultes perforent les feuilles avec leur ovipositeur (appendice en pointe permettant de pénétrer le support des végétaux) pour en extraire la sève et pondre leurs œufs. Ces petites piqûres chlorotiques sont visibles sur les limbes foliaires. Les mâles, dépourvus de ces tarières, profitent également de ces piqûres pour se nourrir. Ces perforations affaiblissent la feuille et créent des portes d'entrée pour les pathogènes, augmentant significativement le risque de maladies.

Les larves, quant à elles, provoquent des dégâts bien plus graves : elles creusent des tunnels sinueux à l'intérieur des feuilles. Ces galeries blanches serpentent sous la surface du limbe, perturbant la photosynthèse et entraînant un jaunissement, puis un dessèchement des feuilles (cf. pic2). À mesure que les larves consomment le tissu végétal, la plante est incapable de fonctionner correctement, ce qui ralentit sa croissance et réduit considérablement son rendement. Cet impact est également aggravé par les brûlures solaires que subissent les plantes, dû à leur feuillage endommagé.

Afin de détecter les infestations, des inspections régulières sont indispensables pour identifier rapidement les plants contaminés. L’utilisation de panneaux englués jaunes, placés au-dessus des cultures en abri, sont fréquemment utilisés pour repérer les adultes.

La prévention des invasions de mouches mineuses repose sur des pratiques culturales rigoureuses. La rotation des cultures, tout d’abord, participe à briser le cycle de vie des insectes. La gestion des débris végétaux, notamment en collectant et en détruisant les feuilles fortement minées, est essentielle pour éliminer les sites de reproduction. Il est également recommandé de désherber la serre et ses abords afin de réduire les habitats potentiels. L'utilisation de filets anti-insectes dans les serres peut constituer une mesure physique efficace afin de prévenir l'entrée des mouches adultes.

Encourager la présence de prédateurs naturels est un moyen efficace pour lutter contre les mouches mineuses. En plein champ ou sous abri, les hyménoptères parasitoïdes représentent une menace pour ces ravageurs. Par exemple, Phaedrotoma sp. et Chrysocharis caribea parasitent les larves de Liriomyza spp., réduisant fortement leurs populations. La Diglyphus isaea, par exemple, dispose non seulement de la capacité de se nourrir de ces mouches, mais a également tendance à paralyser certaines proies avant de pondre un œuf à côté, permettant à sa larve de s'en nourrir. D'autres prédateurs, tels que Dacnusa sibirica ou Opius pallipes, peuvent être introduits dans les cultures pour attaquer les larves jusqu’à l'intérieur des feuilles.

En termes de solutions biologiques, Steinernema carpocapsae, un nématode entomopathogène (parasite d'insectes), peut être appliqué pour cibler les larves dans le sol. Des produits comme Bacillus thuringiensis var. kurstaki (un bio-insecticide bactérien) et Beauveria bassiana (un champignon entomopathogène) sont également utilisés pour contrôler les larves, bien que leur efficacité puisse varier en fonction de nombreuses conditions environnementales. (John L. Capinera, University of Florida, 2001).

Les produits à base de spinosad (issus de la fermentation de bactéries Saccharopolyspora spinosa) ou d’abamectine (obtenu par fermentation du micro-organisme Streptomyces avermitilis) sont également recommandés pour leur efficacité contre les mouches mineuses. Cependant, ces produits doivent être utilisés en rotation avec d'autres méthodes afin préserver les auxiliaires naturels et d’éviter que les ravageurs ne développent une résistance. Enfin, l'huile de neem peut paraître être une option plus douce : elle est souvent utilisée en culture biologique afin de repousser les adultes et traiter les jeunes plants. Cependant, cette dernière doit être appliquée avec soin, car elle peut laisser des résidus indésirables : L'azadirachtine qu’elle contient est un perturbateur endocrinien pour certains mammifères, avec certaines dispositions carcinogènes et génotoxiques.

Malheureusement, le réchauffement climatique accentue la menace des mouches mineuses en créant des conditions idéales pour leur prolifération. L'augmentation des températures et de l'humidité accélère leur cycle de reproduction, rendant les infestations plus fréquentes et difficiles à contrôler. De plus, ce changement climatique risque de faciliter l’arrivée de nouveaux ravageurs dans des régions jusque-là épargnées. Face à ces nouvelles menaces, il est crucial de poursuivre le développement de stratégies de lutte écologiques et innovantes pour protéger durablement les cultures tout en préservant la biodiversité.

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