Les fake news de Zemmour sur le cannabis

Olivier F
27 Sep 2021

Toute la presse ne parle que de la future candidature du polémiste Eric Zemmour à la présidentielle. Mais quelle est sa position sur le cannabis ? Après avoir dans un premier temps montré un intérêt pour la légalisation, Eric Zemmour a tenté de clarifier sa position en faisant preuve d’une grande inculture sur le sujet.


Dans l’émission de C News Face à l’info du 2 septembre 2021, disponible en replay sur le site Zemmour.fr, le polémiste donne son opinion sur le cannabis. Zemmour avoue mal connaitre ce sujet mais en parle tout de même pendant 25 minutes au début de la vidéo. Dans un long monologue, Zemmour reconnait son incompétence mais propage des fake news ou des idées reçues sur le cannabis.

Pour commencer, Zemmour ne prend pas vraiment position sur la légalisation. Il déteste bien sûr le cannabis mais pense que face à l’échec de la prohibition depuis plusieurs décennies, la solution de la légalisation pourrait être tentée. En fait, Zemmour n’a pas encore choisi entre deux solutions totalement opposées : intensifier encore la répression, avec de nouveaux moyens comme l’armée, ou légaliser le cannabis pour assécher le marché noir.

Selon Zemmour, la légalisation ne serait pas toujours un succès. Il prétend que ce serait le cas en Californie, ou le cannabis n’aurait rapporté qu’un tiers des taxes escomptées, et donne les deux raisons de cet échec. Selon lui, les gens ne voudraient pas payer de taxes et préféreraient se fournir au marché noir à cause de la limitation du THC (un mot que Zemmour ne connaissait pas) sur le marché légal. C’est totalement faux. La Californie ne limite pas le taux de THC, sauf pour les comestibles (edibles). Il est possible d’acheter des concentrés de cannabis, destinés au dabbing ou à la vaporisation, avec plus de 90 % de THC. La limitation du taux de THC est le dernier argument des prohibitionnistes qui prétendent que la légalisation sera un échec.

Zemmour revient rapidement à son obsession pour les étrangers et l’immigration. Il demande la déchéance de nationalité pour les bi nationaux impliqués dans le trafic de drogue, comme c’est déjà le cas pour le terrorisme. Il pense que l’objectif de pays comme le Maroc est de « détruire » la France en exportant du cannabis. Le polémiste qui prétend bien connaitre l’histoire de France devrait lire plus souvent le journal Soft Secrets car il semble qu’il n’ait jamais entendu parler de la Régie des Kifs et des Tabacs. Au Maroc, entre 1912 et 1954, le gouvernement français avait le monopole de la vente légale de cannabis sur lequel il prélevait des taxes. C’est donc bien la France qui voulait « détruire » le Maroc en vendant des stupéfiants. C’est seulement après le départ des Français que le cannabis est devenu illégal au Maroc.

Vient ensuite la comparaison avec l’alcool. Selon Zemmour il serait moins nocif que le cannabis. L’alcool pourrait être consommé modérément alors que le cannabis rendrait systématiquement addict dès le premier joint. Tous les scientifiques (même ceux opposés à la légalisation) reconnaissent pourtant que l'alcool est beaucoup plus nocif que la cannabis.

Comme la plupart des anti-cannabis, Zemmour prétend que l’alcool, contrairement au cannabis, fait partie de la culture française. Rappelons le encore une fois : le cannabis fait également partie de la culture française depuis très longtemps. Nous sommes des millions à avoir grandi avec cette culture, notamment grâce à la musique, au cinéma, à la littérature et à la bande dessinée. Comme le rappelle Zemmour lui même, il y a 5 millions de consommateurs de cannabis en France.

Il est regrettable qu’aucun contradicteur n’ait été présent face à Eric Zemmour sur le plateau de C News ce jeudi 2 septembre et qu’aucun « fact checking » n’ait été effectué. Les chroniqueurs de Zemmour sont toujours en admiration devant lui. Ils l’écoutent religieusement et ne le contredisent jamais. Eric Zemmour contribue à la diffusion de fake news sur le cannabis. Les véritables spécialistes du cannabis, qui maitrisent ce sujet, sont rarement invités à s’exprimer sur les chaines d’information continue et sur les médias généralistes.

 

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Olivier F