Baptiste Lecordier dans un voyage au royaume des terpènes
Baptise Lecordier est un parisien gentil et disponible. Voyageur, entrepreneur et passionné du cannabis, l’automne dernier, lors de notre rencontre à l'un des salons CBD, il m'a intrigué par son dévouement aux propriétés médicales du cannabis et, en particulier, au rôle joué par les terpènes dans le développement de la thérapie.
SSFR : Lors de notre premier rendez-vous, vous vous êtes déclaré « terpénologue ». Pouvez-vous nous expliquer dans quoi vous êtes-vous donc spécialisé ?
Depuis 17 ans je suis un cultivateur passionné et consommateur médical. Les terpènes ont toujours été très importants dans mon échange avec cette plante. J'ai donc étudié l'œnologie du cannabis avec une certification Interpening de Californie et, depuis 7 ans, j'étudie l'agriculture naturelle coréenne et l'agriculture régénérative - sol vivant - permaculture, dans une démarche qui permet d'atteindre une qualité de production irréprochable en termes de goût, effet et respect de l'environnement.
SSFR : Souhaitez-vous nous donner votre définition de l'effet entourage ?
L'effet entourage représente la synergie entre les éléments présents dans la plante à savoir les cannabinoïdes, terpènes et flavonoïdes. La génétique qui, selon les phénotypes, s’exprime de manière très variée, nous donne accès a énormément de différents types d'expression. Chaque profil terpénique et chaque profil de cannabinoïdes ouvrent des portes à de nombreuses possibilités d'usage thérapeutique adapté au besoin de chacun. J'attends avec impatience le développement de la « médecine personnalisée du cannabis » car, en contrôlant le profil des terpènes, nous pouvons arriver à éliminer toute contre-indication potentielle tout en amplifiant la cible thérapeutique souhaitée.
SSFR : Dans quelle mesure les terpènes contribuent-ils à la synergie entre composants qui déclenche l'effet d'entourage ?
Il est essentiel de reconnaître que l'on ignore encore beaucoup de choses sur les terpènes et leurs interactions avec les autres composants, cannabinoïdes et flavonoïdes, présents dans le cannabis. Ceci dit, les chercheurs ont constaté que l'extrait de CBD à spectre complet était quatre fois plus puissant que l'isolat de CBD, ce qui signifie que les patients pouvaient prendre une dose nettement inférieure, et ils ont attribué ce résultat à la synergie thérapeutique des cannabinoïdes et d'autres composés, tels que les terpènes. Des recherches plus récentes ont montré que les terpènes stimulent l'activité des cannabinoïdes, mais que de fortes concentrations ciblées de terpènes étaient nécessaires pour constater cette amélioration. En poussant les mélanges thérapeutiques un peu plus loin, par exemple, on constate que l'alpha-pinène (des aiguilles de pin) et le bêta-caryophyllène (des grains de poivre) peuvent interférer avec les molécules qui dilatent nos vaisseaux sanguins. Moins de dilatation signifie moins d'inflammation. Le myrcène (de la mangue) et le linalol (de la lavande) sont des sédatifs qui contribuent à soulager la douleur, comme le CBD, tandis que l'humulène (du houblon) et le limonène (des écorces d'agrumes) agissent comme des agents anti-anxiété, comme le CBG et le CBC. Engloutissant la surface d'une cellule et se liant à ses récepteurs sous de multiples angles, les cannabinoïdes comme le THC, le CBD, le CBG, le CBN et le CBC produisent de meilleurs résultats lorsqu'ils sont consommés avec un ensemble de terpènes. Les terpènes donc sont reconnus comme jouant un rôle essentiel dans le puzzle global du cannabis.
SSFR : Souhaitez-vous nous parler des terpènes les plus célèbres présents dans le cannabis et de leur potentiel ?
Les terpènes et les terpénoïdes ont un large éventail d'activités biologiques et pharmacologiques. Ils ont des propriétés antifongiques, antivirales, anticancéreuses, anti-inflammatoires, antihyperglycémiques, antiparasitaires, antioxydantes et antimicrobiennes. Le myrcène est le plus petit mais le plus répandu des terpènes présents dans la plupart des variétés de cannabis. Lorsqu'il est utilisé en combinaison avec le THC, les chémotypes de la plante à forte teneur en myrcène produisent un effet "couch-lock", profondément relaxant, tandis que les chémotypes à faible teneur en myrcène (<0,5 % de myrcène) produisent un high plus énergique. Le myrcène a des propriétés antipsychotiques, antioxydantes, analgésiques, anti-inflammatoires, sédatives, myorelaxantes et anticancéreuses. Le terpène le plus important de la plante de cannabis est probablement le β-caryophyllène. C'est un terpène épicé ayant des effets gastroprotecteurs, analgésiques, anticancéreux, antifongiques, antibactériens, antidépresseurs, anti-inflammatoires, antiprolifératifs, antioxydants, anxiolytiques, analgésiques et neuroprotecteurs. La présence de β-caryophyllène dans de nombreuses huiles essentielles pourrait contribuer fortement à leur capacité antivirale. Il a également montré un indice de sélectivité élevé contre le virus herpès simplex de type 1. Les composés importants suivants sont l'α-pinène avec une activité antibactérienne, anti-inflammatoire, bronchodilatatrice, antiseptique et gastroprotectrice, et le β-pinène, efficace comme antiseptique. Le limonène, le plus souvent associé aux agrumes, est également présent dans le Cannabis sativa. Il a une activité antibactérienne, gastroprotectrice, antiproliférative, antifongique, anxiolytique, antidépressive, antimicrobienne, antispasmodique ou immunostimulante. Le linalol, commun à la lavande, peut être utilisé comme sédatif, antipsychotique, anticonvulsivant, anxiolytique, anesthésique, antidépresseur, analgésique, antiépileptique et antinéoplasique. Le terpinéol a des effets antioxydants, antibiotiques et relaxants, et l'oxyde de caryophyllène peut être utilisé comme composé analgésique, anticancéreux, antifongique et anti-inflammatoire.