Interview de Luke “Ming” Flanagan, cultivateur à domicile et député européen
Demandez à quelqu’un de nommer un membre du Parlement européen et il y a de fortes chances qu’il ne puisse pas vous donner un seul nom. Mais il y a un député européen que tout consommateur de cannabis devrait connaître : Luke Ming Flanagan. « Les réaction les plus négatives venaient des méthodes de culture que j’utilise et non pas parce que j’enfreins la loi ! »
Par Derrick Bergman / Gonzo Media
Le Parlement européen est composé de 720 membres, les députés européens. Luke “Ming” Flanagan (52 ans), de nationalité irlandaise, est député européen indépendant depuis 2014. Il a commencé à fumer du cannabis alors qu’il étudiait à Galway, où sa carrière politique a débuté en 1997. Il s’est présenté comme candidat indépendant sur une liste prônant la légalisation du cannabis.
Deux ans plus tard, il a fait campagne pour devenir député européen indépendant pour la première fois. Flanagan a attiré l’attention des médias, mais n’a guère été pris au sérieux. Les journalistes se sont concentrés sur sa barbe et sa coiffure. Son surnom fait référence à Ming, le méchant du dessin animé Flash Gordon. En 2001, Flanagan a fait la une des journaux quand il a envoyé plus de 200 joints aux membres du parlement irlandais. La légalisation du cannabis est restée l’un de ses principaux combats à ce jour.
Quand, en 2011, il a été élu député du Dáil, la Chambre des représentants irlandaise, Flanagan a donné la moitié de son salaire à des projets locaux. Il a continué à le faire une fois député européen. L’Irlandais est très actif sur les réseaux sociaux. Il tweete régulièrement des photos des plantes de cannabis qu’il cultive dans son appartement de Bruxelles.
Soft Secrets : Vous avez commencé à fumer du cannabis à l’université; avez-vous aimé ça tout de suite? Était-ce de l’herbe ou du haschisch ?
Luke Flanagan : Oui, j’ai trouvé ça très apaisant. Le haschisch était de loin le cannabis le plus couramment disponible en Irlande au début des années 1990.
Considérez-vous votre consommation comme médicinale, récréative, spirituelle ou une combinaison de tout ça ?
Une combinaison. On m’a diagnostiqué autiste au début de cette année. Cela m’aide à réguler mes émotions.
Vous avez milité pour la légalisation depuis vos débuts en politique. Pourquoi est-ce si important pour vous? N’aviez-vous pas peur que cela “ternisse” votre réputation ?
Je ne suis pas à l’aise avec l’idée que quelqu’un puisse contrôler ce que l’on fait de son propre corps. La plupart de mes collègues consomment du cannabis, donc cela n’a pas terni ma réputation auprès de mes proches. Cela m’a cependant valu des années de fouilles invasives par la brigade des stupéfiants.
Vous avez envoyé des joints à tous les membres du parlement irlandais. Avez-vous été poursuivi pour ça ?
Je voulais attirer leur attention sur le sujet, en auto-intitulant cette journée “Journée nationale de légalisation du cannabis”. Un dossier a été envoyé au procureur général, mais aucune charge n’a été retenue. Je leur ai écrit pour leur demander pourquoi, étant donné qu’il était clair que j’avais cultivé et fourni une substance illégale en vertu de la loi sur l’abus de drogues. J’attendais mon tour au tribunal.
Le plan était d’accrocher une copie d’un amendement à la loi sur l’abus de drogues à la porte du tribunal. Comme Martin Luther a accroché sa thèse de 95 sur la porte de l’église de Wittenburg en 1517. Mais ce ne fut pas le cas. J’ai reçu une lettre du procureur général six mois après l’événement disant qu’aucune charge ne serait retenue. Ayant été fouillé à de nombreuses reprises auparavant, je n’ai jamais été fouillé ni poursuivi depuis.”
Qu’avez-vous appris de la politique européenne au cours de vos dix années en tant que député européen?
Du point de vue de la politique du cannabis, il est très utile de pouvoir citer les développements qui ont eu lieu en Allemagne, à Malte, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Espagne et en Tchéquie comme preuve que la question de la légalisation est devenue courante. En fin de compte, l’UE ne décidera pas de la légalisation au sein de ses membres. Cependant, elle a un rôle à jouer dans l’accord de Schengen pour la liberté de voyager avec son cannabis. Je cherche actuellement à reconstituer le groupe Legalize Cannabis au Parlement. Malheureusement, aucun des membres d’origine n’est revenu pour ce mandat, à part moi même, donc je cherche de nouveaux alliés.”
Quand et pourquoi avez-vous commencé à publier des photos du cannabis que vous cultivez dans votre appartement bruxellois sur les réseaux sociaux?
J’ai commencé en 2023. Je cultive à Bruxelles depuis 2018, alors je me suis dit pourquoi pas? Cela a quelque peu normalisé l’idée qu’un élu puisse faire une telle chose. Ça a également été instructif dans la mesure où la réaction la plus négative a été suscitée par mes méthodes de culture et non le fait que je viole réellement la loi ! Cela montre qu’à ce stade, le public a pris une longueur d’avance sur les législateurs.
Laquelle des variétés que vous avez cultivées a donné les meilleurs résultats ?
La Pineapple Kush est de loin la meilleure que tout ce que j’ai jamais acheté. J’en cultive deux en ce moment.
Est-il difficile de défendre la légalisation du cannabis au Parlement européen ?
C’est devenu un sujet récurrent qui est renforcé par les changement récents dans divers États de l’UE. Nous pouvons désormais inclure l’Irlande également. Un rapport du Parlement vient de recommander l’autorisation des cannabis clubs, une voie qui est soutenue par une large coalition de partis politiques et d’indépendants.
Pensez-vous que l’UE légalisera dans son ensemble ou que les États membres légaliseront de leur propre chef ?
Cela se fera État par État. Schengen et la liberté de circulation sont les plus délicats, mais je pense qu’il y a une dynamique en faveur de la légalisation qui va se développer progressivement jusqu’à ce que nous assistions à un changement à l’échelle de l’UE.