Un patient belfortain demande à la justice de le laisser fumer du cannabis
Il enfreint la loi par nécessité car seul le cannabis le soulage
Il enfreint la loi par nécessité car seul le cannabis le soulage
Seul le cannabis soulage les terribles douleurs de Dominique Loumachi : atteint de myopathie depuis l’enfance, il demande à la justice de reconnaître cet usage comme un état de nécessité. Le tribunal correctionnel de Belfort doit se prononcer sur son cas mercredi.
«Je suis condamné, ma maladie est incurable et seul le cannabis me soulage», résume M. Loumachi, 40 ans, qui a comparu mi-décembre devant le tribunal pour «usage et détention» de cannabis. Le parquet a requis 300 euros d’amende avec sursis.
Le patient demande «juste qu’on (le) laisse fumer pour vivre tranquillement» et regrette d’être obligé «d’injecter de l’argent dans une économie souterraine pour acheter de l’herbe» depuis la saisie de ses plants par la police.
Il n’arrêtera pas de fumer, «à moins qu’on trouve un traitement efficace», assène-t-il.
A huit ans, cet enfant de la DASS déclare une myopathie, une dermatopolymyosite caractérisée par l’inflammation et la dégénérescence des fibres musculaires. Dès lors, sa vie est ponctuée de douleurs, de séjours à l’hôpital et surtout, de lourds traitements médicamenteux.
«J’étais un cobaye de la science, légalement drogué jusqu’à la moelle», se rappelle le quadragénaire, qui se déplace parfois en claudiquant, parfois à l’aide d’une canne, et évoque avec dégoût les 76 effets secondaires d’un des traitements médicamenteux qu’il a subis.
En 1992, l’homme se tourne vers un remède alternatif et illégal: le cannabis. Il le fume, l’infuse ou le cuisine.
Pour lui, il s’agit d’un «vrai traitement: je dose la quantité en fonction de la douleur», explique-t-il, le visage émacié marqué par la maladie.
M. Loumachi cultivait quelques pieds de cannabis chez sa soeur, à Belfort, pour sa consommation personnelle, mais la police a découvert et saisi cette plantation interdite.
Devant le tribunal, son avocat, Me Jean-Charles Darey, a plaidé la relaxe pour «état de nécessité», estimant que son «client se trouve dans un état de douleur qui l’oblige à violer la loi sur les stupéfiants en consommant du cannabis pour moins souffrir».
Un médecin belfortain, le neurologue François Ziegler, a d’ailleurs attesté par écrit que le patient souffrait de «douleurs neurologiques pour lesquels du cannabis peut être bénéfique en traitement adjuvant de la douleur».
«L’état de nécessité» est prévu par l’article 122-7 du code pénal et admet qu’un individu peut enfreindre la loi pour «accompli(r) un acte nécessaire à (sa) personne», s’il fait «face à un danger actuel ou imminent».
L’avocat s’est appuyé sur l’arrêt de la cour d’appel de Papeete (Polynésie française) du 27 juin 2002, qui avait relaxé un homme paraplégique utilisant du cannabis pour calmer ses douleurs.
Outre cet arrêt, «une seule autre personne a été relaxée en France, à Bourges en 2011», indique Fabienne Lopez, présidente de l’association «Principes actifs», qui milite pour une évolution de la législation en la matière. «La plupart du temps, les malades qui utilisent du cannabis sont condamnés», déplore-t-elle.
«Je me battrai tant que cet état de nécessité n’aura pas été reconnu par la justice, quitte à aller devant la Cour européenne des droits de l’homme», prévient Dominique Loumachi.
Il a déjà annoncé que s’il ne bénéficiait pas d’une relaxe mercredi, il ferait appel.
«Je ne demande pas qu’on légalise le cannabis, qui reste une drogue, mais seulement qu’on tolère son usage thérapeutique, sur ordonnance, pour les malades», précise le patient qui vit avec 900 euros par mois d’une pension d’invalidité (95%) et d’adulte handicapé.