Pays Basque: le créateur d'un cannabis social club tabassé et volé
et ne peut pas porter plainte...
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Le sexagénaire, qui défend la vocation "thérapeutique" du cannabis, le revend à prix coûtant. Lundi, il s'est fait agressé, chez lui, par trois jeunes hommes venus lui voler son herbe
Les faits qui suivent sont si particuliers, qu'ils pourraient sembler sortis de l'imagination embrumée d'un consommateur régulier de stupéfiants. Ils sont pourtant véridiques, narrés par sa victime, et corroborés par le certificat médical d'un médecin des urgences d'une clinique de l'agglomération bayonnaise.
L'homme qui est en le protagoniste a une soixantaine d'années. Il a des attaches dans le Pays basque, et il s'y est installé il y a un an et demi. Il réside dans une maison isolée, dans une commune dont le nom ne sera pas dévoilé. Et pour cause. Le sexagénaire à l'allure frêle qui reçoit « Sud Ouest » dans son salon coquet où fleure un léger parfum de cannabis, est le créateur d'un « Cannabis social club » : une entité qui revend le cannabis à prix coûtant auprès de ses membres.
Ces clubs, licites de l'autre côté de la frontière - le Pays basque espagnol en compte une cinquantaine et l'Espagne entière en aurait près de 300 - sont forcément clandestins de ce côté de la Bidassoa, où prospère une législation toute différente.
Fumeur depuis l'âge de 20 ans et cultivateur passionné, le fondateur du « Cannabis social club » du Pays basque indique s'être rallié à un mouvement national, qui a vu, depuis le 17 juillet 2012, la création de plusieurs entités portant le même but : produire de l'herbe, mais pas de l'oseille. Le tenant du Cannabis social club basque défend aussi une vocation « thérapeutique ». Lui, qui goûte les vertus de l'herbe depuis sa jeunesse pour ses effets « apaisants », revend également à prix coûtant, sa production à des amis malades. Ses membres sont au nombre de six. « Deux ne sont pas thérapeutiques », mais plutôt dans la catégorie « pétard du soir », reconnaît le très civil patron du club, « mais les quatre autres, oui ». Ainsi, ce père de famille qui défend l'usage de stupéfiants à ses enfants, car « avant il faut savoir quoi faire de sa vie », fournit le fruit de sa culture à des amis malades du sida.
Parmi les clients de sa petite entreprise, qu'il aurait bien voulu déclarer en préfecture, comme association loi 1901 à but non lucratif, mais « cela n'a pas été possible », il y a un ami de 65 ans. « Un ancien junk. Un des derniers survivants des années 70. Le cannabis l'aide à vivre. Il a l'hépatite C », mentionne celui qui ne prétend pas avoir quelque connaissance médicale, mais qui « pourrait écrire un livre » sur les propriétés des diverses variétés d'herbe de cannabis.
La petite boutique de ce père tranquille, accompagné dans ses moindres pas par un chien de berger « doux comme un agneau », coulait donc des jours paisibles jusqu'à lundi 24 février. Vers 2 heures du matin, notre cultivateur d'herbe africaine, pour ses vertus « plus cérébrales » et d'herbe indienne, pour ses propriétés « plus relaxantes », est réveillé par des coups sur la porte d'entrée de son habitation. Ne pensant pas à mal, il ouvre, et reçoit plusieurs coups de pieux en bois. « Donne-nous ta beuh », lance celui qui semble être le meneur de deux autres jeunes hommes âgés de 18-20 ans, estime la victime.
Tous trois sont dissimulés par leurs vêtements, dont des capuches. Le sexagénaire s'empresse d'ouvrir un tiroir pour leur donner deux sachets et une boîte d'herbe de cannabis. Les coups de pieux continuent de pleuvoir. Une « ultraviolence » de dix minutes, selon la victime qui portait encore hier les marques de l'agression : contusions, hématomes, œil poché. Les trois voyous font un rapide tour de l'habitation et trouvent la récolte d'octobre qui séchait dans le garage. Une dizaine de pieds femelle de deux mètres de haut. « Ils en ont pris quatre. J'ai pas encore fait le ménage », témoigne le boutiquier du THC (1) sur le pas de la porte du garage, devant un sol jonché de têtes de cannabis. Près de la porte d'entrée, gît le pieu de bois qui a été utilisé pour tabasser le sexagénaire. Il a été rompu à force d'asséner des coups. « Vous croyez que les empreintes digitales sont utilisables ? », questionne la victime avec une naïveté confondante.
Car le spécialiste en herbe se pose désormais la question de déposer plainte. « Je risque une peine plus lourde que mes agresseurs. C'est tout le problème de la législation sur le cannabis », regrette le producteur du Pays basque. « Le but c'est la paix. Si cela doit produire de la violence, je vais arrêter. »
Source : http://www.sudouest.fr