Graines féminisées - Les techniques de féminisation

Exitable
02 Mar 2019

Les graines féminisées sont arrivées sur le marché du cannabis il y a environ 15 ans. Même si certaines banques de graines étaient au départ réticentes, la quasi-totalité propose aujourd’hui des graines féminisées dans leur catalogue. Quelles sont les différentes techniques de féminisation et est-il possible de produire soi-même des graines féminisées ?


La plupart des cultivateurs utilisent uniquement des graines féminisées et certains n’ont même jamais vu une plante mâle de leur vie. Beaucoup d’entre nous n’ont pas connu l’époque ou seules les graines régulières étaient disponibles. Pour cultiver à partir de graines, la seule solution était alors de lancer deux fois plus de plantes. Pour obtenir, par exemple 10 plantes femelles, il faillait planter 20 graines régulières. Il était bien sûr impossible de prévoir exactement le nombre de plantes femelles et il y avait souvent de bonnes ou mauvaises surprises. Il arrivait parfois de se retrouver avec une seule ou même aucune plante femelle sur un paquet de 10 ! Pour les cultivateurs qui en avaient la possibilité, la meilleure solution pour cultiver uniquement des femelles était de se procurer des boutures (clones) de plantes femelles ou de les faire eux mêmes à partir de plantes mères sélectionnées. Tous les cultivateurs n’ont pas les moyens de produire leurs propres boutures. Il faut avoir un espace de culture en indoor avec un éclairage spécifique et la possibilité de cultiver sur une longue période après avoir sélectionné une ou plusieurs plantes mères. Il n’est pas toujours facile de faire ses propres boutures et les cultivateurs doivent connaître un certain nombre de techniques. C’est pour ces raisons que les banques de graines ont commencé à produire des graines féminisées. [caption id="attachment_69585" align="alignnone" width="800"] La plupart des cultivateurs choisissent des graines féminisées.[/caption] Les cultivateurs en extérieur en particulier étaient intéressés par les graines féminisées. En effet, les cultivateurs outdoor doivent garder leurs plantes en croissance pendant plusieurs mois avant la révélation du sexe, en général durant le mois d’ août. Dans les cultures guerilla, les plantes sont parfois difficiles d’accès et il n’est pas toujours évident d’enlever les mâles avant la pollinisation. Avec une culture à base de graines régulières, le cultivateur outdoor peut se retrouver avec une majorité de plantes mâles, ce qui peut compromettre toute sa saison, les plantes ne fleurissant qu’une fois par an en extérieur. L’arrivée des graines féminisées, puis des graines féminisées autofleurissantes, a boosté le secteur, en rendant la culture du cannabis facile d’accès. Plus besoin de reconnaître les mâles et les femelles et plus de risque de se retrouver uniquement avec des mâles dans son espace de culture ou de faire face à une pollinisation indésirable. Quel que soit le produit ou la technique employé, le principe est toujours le même. Ce sont les plantes hermaphrodites qui permettent la production de graines féminisées. Il s’agit donc de rendre hermaphrodite une plante femelle. On appelle ce processus de changement de sexe, la « réversion ». Le pollen de cette plante permettra de féconder un groupe de clones femelles et d’obtenir des graines féminisées sans avoir les traits hermaphrodites d’une véritable plante hermaphrodite. On parle donc de « féminisation » de graines mais il s’agit surtout de « masculiniser » une plante femelle qui fera office de mâle reproducteur. Des produits comme le GA3 ou le nitrate d’argent permettent donc le développement d’organes mâles et d’autres comme la phytohormone auxine ou l’éthylène favorisent le développement d’organes femelles. Les graines de cannabis féminisées sont arrivés assez récemment sur le marché mais des techniques de changement de sexe des plantes sont connus depuis plusieurs décennies. Des expériences ont notamment été menées pour la culture des cucurbitacées qui ont une sexualité diversifiée. « En fait, la féminisation existe depuis plusieurs décennies avec les auxines, colchiques ou autre, et le sujet est resté un peu secret et peu diversifié dans le monde botanique. Pour le secteur cannabique, cela est donc venu bien après. Avec l'évolution des individus, des jeunes sortis d'études et de stages ont donc aussi fortement fait bouger les choses dans notre domaine, tant il y avait à faire et à apprendre avec cette plante... » nous explique Botaquantik, le breeder de Mother Seeds et collaborateur de Soft Secrets France.

La rodhélisation

Il s’agit de la méthode la plus simple pour obtenir de graines féminisées de façon naturelle sans aucun produit. Le but est de stresser une plante de cannabis femelle pour la rendre hermaphrodite. Changer plusieurs fois la photopériode est l’une des techniques qui permet de stresser la plante et d’obtenir des fleurs mäles Garder la plante dans son espace de culture à la fin du cycle de vie, bien après la maturation pourra favoriser l’apparition de fleurs. Cette technique est aléatoire et ne permet pas toujours d’obtenir de bons résultats.

Gibbérelline

Les gibbérellines forment une famille de phytohormones. Leur composé actif est appelé acide gibbérellique. Les gibbérellines sont nommées G ou GA et suivi d'un nombre allant de 1 à 110, la GA3 étant la plus connue. Utilisé depuis longtemps pour la culture des plantes, dont le cannabis, la gibbérelline a été identifié pour la première en 1926 par le phytopathologiste Eiichi Kurosawa. La structure chimique de l'acide gibbérellique a été déterminée en 1955. Présente à l’état naturel dans les végétaux, elle est cultivée en laboratoire sous forme de champignon et commercialisée sous forme de spray GA3. Dans le domaine du cannabis, elle a plusieurs utilisations. Elle favorise la germination, en levant la dormance de certaines graines anciennes ou qui ont des difficultés à germer. Certains l’utilisent pour obtenir des fleurs femelles plus grosses, à condition de ne pas dépasser certains dosages. Mais le GA3 est surtout utilisé pour reverser les plantes femelles. Le spray est déposé sur un coton qui est appliqué directement sur les fleurs femelles de la plante sélectionnée, au début ou au milieu de la floraison. Devenu un plant hermaphrodite, elle pourra polliniser un groupe de clones qui produiront alors uniquement des graines féminisées. L’acide gibbérellique a longtemps été utilisé pour obtenir des graines féminisées mais la plupart des banques de graines professionnelles utilisent maintenant le nitrate d’argent, considéré plus efficace.

Nitrate d’argent

Le nitrate d’argent /est un composé inorganique qui a différentes utilisations, notamment dans le domaine de la santé grâce à se propriétés antiseptiques. Il est utilisé pour la production de graines féminisées la plupart du temps en combinaison avec de du thiosulfate de sodium pour former le STS (Silver Thiosulfate).

STS

Le STS est un mélange de nitrate d’argent et de thiosulfate de sodium. Ce produit est le plus utilisé pour la production de graines de cannabis féminisées. Il est possible de l’acheter tout fait ou de le préparer soi même Voir la recette avec les dosages précis sur le site growbarato.net (tutorial en anglais) [caption id="attachment_69586" align="alignnone" width="800"] Les plantes femelles doivent être pollinisées pendant la floraison.[/caption]

Argent colloïdal

L’argent colloïdal permet également la réversion des plantes de cannabis femelles. On le trouve facilement dans des magasins en ligne et il est possible de le préparer soi même. Le site growweedeasy.com propose un tutorial en anglais pour préparer de l’argent colloïdal avec une pile de 9V, 2 pinces alligator et deux pièces de monnaie en argent.

Les breeders

Le breeding de cannabis destiné à la production de graines féminisées est proche du breeding de graines régulières. La différence est que l’on utilise une plante femelle reversée plutôt qu’un véritable mâle pour la pollinisation. Certaines plantes sont plus aptes à la réversion que d’autres. La difficulté consiste à trouver une plante qui supporte bien la réversion et produit du pollen fertile. Certaines plantes possèdent les qualités recherchées par les breeders mais ont des difficultés à produire des graines féminisées, ce qui pourrait compromettre un projet de breeding. Nous avons demandé à des breeders français quelles étaient leurs techniques de féminisation. Les breeders professionnels communiquent peu sur le sujet car ils souhaitent garder leurs secrets de fabrication. Les produits utilisés pour reverser les plantes sont connus de tous mais les breeders et les banques de graines ont leurs propres techniques. Le but est de trouver le bon dosage et la bonne période pour pulvériser le produit, de façon à obtenir un résultat optimal. Quel que soit le produit utilisé, il est important de porter des protections : gants, masque et lunettes. Le breeder Julien L produit plus de 500.000 graines féminisées par an pour la banque de graines TH Seeds : « J’utilise du nitrate d’argent et du thiosulfate de sodium avec différents dosages et ratios. Chaque breeder a sa propre recette et n’a pas intérêt à communiquer les dosages précis. » Tous les plantes sont cultivés en bio et Julien ne conserve pas de pollen. Il travaille uniquement avec du pollen frais en laissant la pollinisation se faire naturellement dans une box dédiée. Le breeder Botaquantik était au départ assez réticent et préférait les graines régulières mais il produit maintenant lui même ses graines féminisées : « Les graines féminisées présentent aussi un intérêt pour la conservation des génétiques. Garder des plantes mères pendant plusieurs années peut s’avérer compliqué. Je conserve moi même beaucoup de plantes mères et j’en ai perdu deux récemment. Les graines féminisées représentent une bonne alternative pour la conservation de génétiques sur une longue période. » Botaquantik utilise principalement de l’argent colloïdal qu’il achète ou prépare lui-même : « C’est un produit Perfect Grow dosé à 40 % que j’utilise mais j’en prépare aussi un un peu plus fort fait maison » Le breeder utilise également du STS : « Pour le STS, normalement, tout n’est basé que sur une recette perso de chaque breeder. Certains préfèrent l’utiliser léger quitte à pulvériser un peu plus sans brusquer la matrice.» Chez Botaquantik, le plant reproducteur est isolé dans une box à part pour la pulvérisation. Ill est ensuite replacé dans la box avec les clones femelles qui vont être fécondés de façon naturelle. Au moins 6 ou 7 plantes sont pollinisées dans chaque box. La pulvérisation se fait à une période précise et est répété plusieurs fois. Les plantes à dominante indica ou sativa sont pulvérisées à différentes périodes. A la fin de la culture, les graines sont séparées des plantes. Aucune partie de la plante reversée, qui a reçu directement le produit, n’est consommée ou destinée aux extractions. Par Olivier F

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