Le trafic de cannabis en France (2007)

Soft Secrets
16 Jul 2012

Estimation des gains des dealers afin d´apprécier le potentiel de blanchiment


Estimation des gains des dealers afin d´apprécier le potentiel de blanchiment

Tout d'abord, voici un article sur le débat re-re-re-relancé depuis le début de la période présidentielle de notre cher François Hollande.

Et en complément, l'introduction du rapport de l'OFDT de 2007 sur les éventuels gains des dealers.

(Le rapport est à lire en entier directement sur le site du Figaro)

Introduction

Le cannabis est devenu un produit de consommation courante en France. En 2005, 30,6 % des 15-64 ans avaient déjà expérimenté l'usage de cannabis et 8,6 % des Français confiaient avoir fumé au moins un joint lors des douze derniers mois. Le cannabis est la drogue illicite la plus fréquemment proposée à la consommation (Beck et Cytrynowicz, [2006]). Chez les jeunes, la consommation de cannabis paraît s'être banalisée tant le nombre de consommateurs réguliers est important : un garçon sur six et une fille sur quinze étaient fumeurs réguliers de cannabis à 17 ans en 2005 (Beck et al., [2006a,b]).
Le coût social du cannabis, autrement dit le coût que fait supporter le cannabis à la collectivité a été estimé à 919 millions d'euros en 2003 (Ben Lakhdar, [2007]).
Outre les problèmes de santé et d'ordre public posés par sa consommation qui justifieraient
l'interdiction de son usage, le cannabis est classé sur la liste des stupéfiants et à ce titre, la
détention, la vente, l'importation et la culture de cette drogue sont prohibées par la loi (Obradovic et Martineau, [2007]).

Son commerce est donc illégal mais est pourtant une réalité indéniable. Cette étude a alors pour objectif d'identifier les modes de distribution commerciale et les gains illégaux générés par le trafic de cannabis. Précisons qu'il ne s'agit ici que d'étudier le trafic local de cannabis, autrement dit, le trafic international et les profits placés dans quelques paradis fiscaux selon des montages financiers complexes sont hors du champ de ce travail. La problématique ainsi posée est en cela importante que c'est par la lutte contre le blanchiment des capitaux générés par le trafic local de drogue que les incitations à entrer dans ce type d'activité illégale seront amoindries (ENA, [2000]).1

Ce travail se décompose principalement en trois mouvements.

Dans un premier temps, il s'agit de connaître l'ampleur de l'économie du cannabis. À cette fin, nous reprenons une étude menée sur l'évaluation du chiffre d'affaires issu de la vente de détail du cannabis (Ben Lakhdar et al., [2007]). Il ressort que le marché de détail du cannabis représenterait entre 746 et 832 millions d'euros annuel, soit entre 186 et 208 tonnes de cannabis vendues.

Il convient alors de comprendre dans un second temps comment la distribution commerciale du cannabis se fait du grossiste au consommateur final. En plus du versant organisationnel, les marges bénéficiaires se créant d'intermédiaire en intermédiaire sont à étudier pour estimer les gains des dealers dans ce processus de commercialisation. Les rares études françaises montrent ainsi différentes organisations du trafic de cannabis présentant toutefois une constante : l'augmentation du prix de vente au fur et à mesure de la chaîne de distribution. Sur ce point, en plus de la présentation des observations socio-ethnologiques faites en France, deux modèles théoriques d'estimation des profits des dealers seront présentés.

Finalement, l'implémentation sur données françaises d'un modèle de distribution commerciale de drogues illicites permet d'avoir une évaluation des sommes d'argent pouvant faire l'objet de blanchiment. Auparavant, un élément économique important, fondement de l'incitation au trafic de stupéfiant, est évalué, à savoir le taux de ristourne pratiqué sur l'achat en gros de cannabis. Ce dernier, estimé à 0,823, façonne en grande partie le calcul rationnel des dealers et les profits à réaliser.2 Ces gains annuels, fonction de la ristourne et de l'investissement initial des dealers, sont alors évalués entre 253 000 et 552 000 euros au niveau du grossiste, entre 35 000 et 77 000 euros au niveau d'un premier intermédiaire, entre 4 500 et 10 000 euros au niveau d'un second intermédiaire et enfin dans la même fourchette si un dernier intermédiaire intervient au niveau le plus bas de l'échelle de distribution (pour un réseau de distribution à quatre strates).

Le modèle donne aussi comme résultats complémentaires le nombre total de dealers présents sur le territoire et les quantités de cannabis distribuées par chacun d'entre eux.
Avant de conclure ce travail, nous engageons une discussion sur les coûts inhérents à la commercialisation des drogues illicites, l´objectif étant, in fine, de déterminer avec plus de précisions les gains nets issus du trafic de cannabis pouvant éventuellement induire une entreprise de blanchiment.

Ces estimations sont bien évidemment à considérer avec toute la prudence qui se doit dans la mesure où le modèle est très sensible aux variations du taux de ristourne et de l'investissement initial.

 

1. Bien évidemment, la décision d'initier ou de participer à une entreprise criminelle ne dépend pas uniquement de facteurs répressifs ; l'état du marché du travail et le niveau d'éducation influent aussi sur cet engagement (voir pour une approche microéconomique Lochner, [2004]).

Suite du rapport

Rapport de Christian BEN LAKHDAR
Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT)

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