Les French Breeders du Triangle d’Emeraude

Exitable
02 May 2019

Les breeders Léo et Quentin dit Professor Q font partie d’Aficionado Estates, le célèbre groupe de cultivateurs du Triangle D’Emeraude, collaborateurs de Frenchy Cannoli. C’est dans cette région du nord de la Californie que ces passionnés de botanique ont réussi à se faire connaître pour la qualité de leurs variétés et de leurs cultures. En 2019, ils sont de retour en Europe, et plus précisément à Barcelone, ou ils viennent de créer une nouvelle banque de graines : Aficionado French Connection.


Par Olivier F / Photos : AFC

SSFR : Pouvez vous vous présenter individuellement et nous raconter votre rencontre avec le cannabis ?

Quentin : Pour ma part, je suis un grand passionné de biologie depuis très jeune. Je me rappelle qu’à huit ans j’avais déjà une grande variété de reptiles exotiques, ma chambre était une vraie forêt tropicale. Travailler dans le domaine de la biologie ma toujours semblé logique. A l’adolescence j’ai très vite découvert les joies de la guérilla. Entrer dans un lycée horticole m'a donc paru nécessaire. J'ai donc fait les études dans le domaine horticole : en filière scientifique puis Productions Horticoles et amélioration des semences… Et bien sur, diverses expériences professionnelles en « tissue culture » et production de potée fleurie…La pression en France étant trop forte, je suis rapidement parti sous le soleil de catalogne puis de la Californie !

Léo : J’ai grandi une bonne partie de ma vie au Japon. Je suis grand fan de voitures ainsi que de courses de drift illégal et ce milieu croise la culture du cannabis. Il y a beaucoup de consommateurs, ce qui m’a rapidement mis le pied à l’étriller. Mais dans ce pays les lois sont très dures il y a une grande répression et impossible de faire quoi que se soit sans l’accord des Yakuzas !

Pourquoi vous êtes-vous lancés dans le travail de breeder ?

Q : En temps que grower, mon but a toujours été l’amélioration de ma technique. Arrivé à un certain point, l’un des facteurs limitant devenait génétique. La suite logique était donc d’appliquer mes études, mon savoir sur mes plantes.

L : Lorsque je suis arrivé dans le Triangle d’émeraude, un breeder réputé m'a pris sous son aile et m’a tout appris avant de mourir (le légendaire breeder : Mandelbrot). Il ma transmis cette passion pour la création de nouvelles strains dans le respect de l’endroit qui nous loge. A ce moment, beaucoup de weed me passait dans mains. Toute cette diversité ma permis de voir ce qui se fait de meilleur, provenant de tous les recoins des montagnes. C’est tout ce qui m’a permis de développer des variétés uniques et prestigieuses qui ont forgé la réputation Aficionado au fil des années.

Comment vous êtes vous retrouvés dans le Triangle d’Emeraude à cultiver du cannabis ?

Q : Ma rencontre avec Léo s’est faite autour de la Skunk Roadkill. Frenchy Cannoli connaît la liste par cœur des strains que Léo recherche. L’original Skunk Roadkill en faisait parti. Lors de son premier workshop à Barcelone Frenchy demande à tout hasard si quelqu’un a entendu parlé d’une génétique Roadkill. Le destin a fait qu’une connaissance était présente et ma directement appelé savoir si j’avais toujours se fameux cut de Skunk des années 90 provenant directement de Flying Dutchmen. Nous nous sommes directement rencontrés. Le courant entre nous est directement bien passé. Léo est venu passer 10 jours à la maison afin de découvrir mes différentes installations ainsi que mon travail. C’est suite à ça qu’il ma fait devenir partenaire de Aficionado Estates et venir vivre dans le triangle d’Émeraude.

L : A la fin de mes études et pour suivre la carrière familiale, je suis rentré dans l’armée. Seulement quelques années m’ont suffit pour ouvrir les yeux et faire un rejet de l’ordre et du système établi…. A ma connaissance il n’existe qu’un endroit sur terre, où je pouvais vivre à ma façon avec des gens qui partagent les mêmes valeurs que moi, et où une véritable culture du cannabis s’y est développé depuis les année 65, le Triangle ! J’ai donc tout quitté pour aller tenter ma chance dans les forets de séquoia et vivre du cannabis ! A cette époque on, devait être introduit par quelqu’un pour ne pas avoir de problème, heureusement OG Mike (des Grateful Dead Familly) m’a pris sous son aile et ma amené à Mendocino. C’est là que tout a commencé.

Qui sont exactement les Aficionado US ?

Q : Nous sommes deux : Leo (américain/philippin) et moi (niçois) + des travailleurs saisonniers. Quand à Aficionado French Connection, nous sommes trois cofondateurs, Leo et moi, mais aussi un troisième, français, dont vous allez vite entendre parler. Evidemment au sein de la famille Aficionado, nous ne pouvons pas oublier de mentionner Frenchy Cannoli, le hashishin officiel. ! Une collaboration qui dure depuis des années. 

Quelles sont les possibilités pour un cultivateur de cannabis français de résider légalement aux USA ?

Q : Pour un travailleur étranger, la situation est très compliquée. Le cannabis est encore illégal au niveau fédéral et sachant que les visas sont fédéraux, cela a pour conséquence que aucun visa ne sera délivré si ça a le moindre rapport avec le cannabis. Pire, le simple fait de demander peut vous faire interdire d’entrée sur le territoire pour 5 ou 10 ans. Il est donc interdit pour un travailleur étranger de travailler dans le domaine du cannabis. Mais l’hypocrisie Américaine fait qu’il est possible et légal pour un étranger d’investir (uniquement investir et non travailler) dans le secteur du cannabis et donc de posséder des parts d’une entreprise de cannabis. A savoir, pour que le visa investisseur soit accepté, il faut compter minimum 100 000 dollars. En dessous les dossiers ne seront pas examinés. Comme vous pouvez le voir si vous n’êtes pas marié à une américaine ou bien née avec une double nationalité, vous ne pourrez pas travailler aux USA dans le secteur du cannabis. Les choses seront sans doute différentes quand le cannabis sera légal au niveau fédéral.

Vous êtes donc de retour en Europe, pourquoi avoir choisi l’Espagne ?

L : Barcelone est aujourd'hui la capitale multiculturelle du cannabis en Europe. Réputée pour ses clubs, ses Cannabis cups et bien sur sa Ganja ! Quel plaisir de pouvoir venir y déguster un spliff accompagné d'un smoothie ! Il y a ici une réelle effervescence, on peut y voir l'émergence de nouvelles idées constamment.

Quelles sont les variétés de la nouvelle banque AFC ?

Q : Nous avons commencé avec une gamme exclusive en série limitée. Parmi nos plus belles créations nous avons sélectionné 6 strains AFC aux profils totalement uniques et de haut standing, destinées aux breeders et growers de cannabis supérieur : Fruit Tartare, Fruit Flambé, Sorbet à l’Orange, Cherry Noir, Pineapple Sorbet et Spyrock Chem Hasplant. Dans 3 mois, suivront les séries féminisées à un prix plus bas et avec une grande diversité de choix.

Comptez-vous vendre vos seeds dans les seed shops français ?

Q : Oui, nous projetons de distribuer dans les shops français. Il ne sera retenu qu'un nombre limité de seed shops sélectionnés pour leurs compétences.

Utilisez vous des techniques de breeding particulières ?

Q : Je pense que le breeding présente les mêmes techniques et règles de base quelque soit le type de plante. Toutes nos seeds sont produites de manière 100% organique que se soit en indoor ou en extérieur. Nous affectionnons particulièrement le breeding en extérieur, pour une meilleure acclimatation et une expression des gènes plus prononcée. De plus, nous nous sommes rendus compte que nos seeds produites en extérieur montrent une plus grande vitalité.

Combien de temps vous faut-il pour créer une variété ?

Q : En intérieur il est possible de produire 3 ou 4 générations en une année alors qu’en extérieur une seule génération par an est possible. Prenons l’exemple de la Magnum Opus breedé par Leo Stone. Cette strain, issue de la Long Valley Royal Kush , est un croisement de Purple Urkle x Sour Diesel x Afghan. Elle a été initialement breedée par Mandlebrot (le mentor de Leo) il y a plusieurs années. Il l’a mené jusqu'à 8 générations avant de mourir. En l’honneur de son mentor, Leo a donc décidé de reprendre le travail sur cette strain en y appliquant les techniques « old school » de breeding. Avant, dans les montagnes, il était difficile de garder des mères pendant plusieurs années. Les growers étaient donc obligés d’utiliser des graines et afin d’éviter la consanguinité des techniques de breed ancestral étaient utilisés. Dans les pays producteurs, les fermiers utilisent leurs graines depuis des milliers d’année en y appliquant une sélection et sans jamais avoir de problème de consanguinité.

Leo a donc popé un vieux stock de F1 afin de sélectionner une femelle sur laquelle il a appliqué le pollen de la F9 et a décidé de prendre un tout nouveau chemin en sélectionnant un phéno tout à fait unique et différent de la Long Valey Royal Kush originelle. La Magnum Opus est alors née ! Il a ensuite mené cette strain jusqu'à F12 en utilisant à chaque fois le pollen de deux mâles afin de conserver une certaine richesse génétique et ne jamais perdre en vitalité. Au rythme d’une génération par an en extérieur, faites le calcul du temps nécessaire a son élaboration ! Évidement, il s’agit d’un cas particulier et nous n’avons pas besoin de 12 ans pour l’élaboration de chaque strain !

Où trouvez-vous les graines ou les clones pour créer de nouvelles variétés ?

Q : La recherche de génétiques rares représente une grande partie de notre travail. Elles proviennent de différentes sources, généralement de growers du Triangle d’Emeraude (nous donnons toujours le crédit de l’origine de chaque strain utilisée avec l’autorisation du breeder) ou de landraces collectées lors de nos expéditions dans les pays producteurs. Par exemple, Nous travaillons sur une Skunk collectée en Corse en 1974. La Skunk est une variété qui a été breedé par un biker originaire d'Alaska.

Pollinisation naturelle ou vous conservez le pollen ?

L : Aficionado US fait uniquement du breed en extérieur. Le pollen est recueilli dans des plats en pyrex pour être ensuite appliqué aux doigt (au moment opportun ) directement dans le champ sur la femelle sélectionnée parmi plusieurs centaines. A comparer à la pollinisation au pinceau, la technique du doigt permet un meilleur rendement du pollen ainsi qu’un meilleur contrôle de la pollinisation (pas de pollinisation accidentelle des autres plantes grâce a cette technique). Nous utilisons aussi des serres avec filet pollen proof de 19 microns, ce qui permet de réaliser des pollinisations anémophiles (par le vent). Dans un prochain article, je me ferai un plaisir de partager un maximum d’infos sur la pollinisation aux doigts

Faites-vous vous-même la féminisation et avec quelle technique ?

Q : Nous réalisons nous même nos seeds féminisées grâce à l’argent colloïdal, afin de rester un maximum organique à contrario du STS

Quelle est la taille de vos installations ?

L : Nous possédons une ferme familiale à Mendocino. Là, nous possédons un outdoor ainsi que des serres équipées de systèmes d’occultation de lumière (light dep). C’est à cet endroit que nous breedons et produisons nos seeds. Cette ferme est entourée de « manzanilla » qui est une plante connue par les locaux pour être indicatrice de la présence de bons facteurs climatiques et géologiques pour la culture de cannabis. A côté de ça, nous travaillons avec différentes fermes un peu partout qui cultivent nos strains, ce qui nous permet de réaliser des sélections sur des grand nombre de sujets, ainsi que les tester dans différentes conditions !

Q : Les installations Aficionado French Connection se trouvent elles en Europe, notamment des indoor en Espagne.

Quelles sont vos techniques de culture ?

L : Nos cultures sont entièrement organiques en living soil. Pour ce faire, nous cultivons en extérieur dans des smart pot de 300 gallons, auxquels vont s’ajouter plusieurs structures grillagées afin de maintenir les plantes. De plus, durant les mois de juillet / août quand les chaleurs sont trop fortes nous aimons utiliser un voile d’ombrage de 30%. Le reste des cultures se fait en « rize bed », sous serres équipées de système d’occultation afin de forcer la floraison ce qui permet de produire 2 à 3 runs de fleurs dans la saison. Une grande partie des intrants est produite sur place ou provient de l’une des fermes voisines. Durant toute la culture, l’arrosage se fait à l’eau, à l’exception d’un arrosage au thé de compost par semaine. Les cycles de culture se font en respectant le cycle lunaire, à savoir qu’ici à Mendocino, les gens ont développé leur propre calendrier lunaire. Il y a des lunes qui favorisent la production de terpènes alors que d’autres auront tendance à produire des plantes de grande taille.

Q : Les cultures indoor sont elles aussi en living soil. Nous avons donc développé un modèle de culture lui aussi en rize bed. Il nous a fallu de longues expérimentations avant de trouver comment conserver les liaisons du complexe argilo humique dans une culture intérieure. En effet, le C.A.H est inexistant dans les cultures en pot. L’un des facteurs est le ratio hauteur/largeur qui va exercer une pression sous laquelle le C.A.H ne peut se former. Un autre challenge technique à été la manière de mettre en place une rotation des lits de culture dans le but de laisser reposer les sols le temps de se régénérer, tout en conservant la chambre de floraison active. Nous n’avons pas choisi la facilité mais c’est de loin le modèle de culture le plus efficient que nous ayons trouvé pour la production de cannabinoïdes et de terpènes !

Type d’éclairage ?

L : En serres (green houses), afin de commencer les cultures à partir de février, nous avons recours à des lampes pour atteindre 18h de lumière car les journées sont encore trop courtes pour assurer la croissance des plantes. Nous utilisons de simples guirlandes d’ampoules Philips, comme des lampes type ampoule double connexion.

Q : En indoor, Dimlux 630 Expert. Après de nombreux comparatifs, c’est la lampe avec la meilleure intensité et le spectre le plus riche pour la production de terpènes.

Préférez vous consommer de la marijuana ou des extractions ?

L : Je suis un amoureux de la ganja ! Je ne fume que peu d’extractions, mais quand j’en fume c’est de la sauce royal key organique ! Un artiste !

Q : Je vais répondre comme Leo, je suis clairement un fumeur de ganja ! J’apprécie une bonne extract mais Leo et moi sommes surtout grands fans des différentes techniques de « sieving » (hasch, ce qui n’est pas vraiment une extraction). Ce n’est pas pour rien que Frenchy Cannoli est notre Hashishin officiel. Je l’avoue, je suis grand fan de ses produits.

Que pensez vous du travail des breeders et des cultivateurs français ?

Q : Les français ne peuvent pas rivaliser en quantité avec les Californiens mais ils rivalisent en qualité ! Il y a de réels artistes non reconnus en France !

Les French Breeders du Triangle d’Emeraude
Début de saison a la ferme : photo de Jeunes plantes s’épanouissant sous la lumière naturelle
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Arrosage d’une plante cultivée en Smart Pot 300 gallons. Utilisation de Trifolium comme couverture, plante fixatrice d’azote, sachet blanc d’acariens prédateurs, gravillons dans les allées pour limiter la poussière sur les plantes.
Les French Breeders du Triangle d’Emeraude
Photo prise au cœur du Triangle d’Emeraude, vue sur les deux vallées emblématiques : Spy Rock et Bell Springs.
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