Le réseau "Furax" et ses dizaines de tonnes de cannabis devant les assises de Paris
Un réseau bien organisé
Un réseau bien organisé
Des dizaines de tonnes de cannabis, des millions d'euros en liquide, le réseau "Furax" est parvenu, en quelques mois seulement, à écouler des quantités industrielles de drogue avant son démantèlement et le renvoi aux assises de neuf personnes, qui seront jugées à partir de lundi à Paris
Les gendarmes de la section de recherche d'Orléans ont enquêté durant deux ans, de février 2008 à février 2010, sur ce réseau qu'ils avaient baptisé "Furax", avant d'en interpeller les membres principaux, dont plusieurs s'apprêtaient à quitter le pays.
Des jeunes gens originaires de Dreux (Eure-et-Loir) et ses environs avaient mis sur pied une organisation très structurée qui assurait l'importation de la marchandise du Maroc en France via l'Espagne, le stockage et la livraison à des grossistes.
Les trafiquants avaient fait d'un corps de ferme, situé dans une petite ville proche de Dreux, leur centre de stockage, où ont été saisies, en février 2010, 3,2 tonnes de résine de cannabis, une prise record pour la gendarmerie. La drogue était remontée d'Espagne par convois "go fast" (véhicule roulant à vive allure), parfois plusieurs fois par mois, grâce à une flotte de voitures puissantes.
Sur une période de 14 mois, visée par l'instruction, l'enquête a mis en évidence 45 convois qui auraient acheminé, au total, 50 tonnes de cannabis. L'ensemble faisait l'objet d'une comptabilité soigneusement documentée sur des cahiers retrouvés dans la ferme.
Les deux chefs présumés du réseau en avaient cloisonné les activités (commandes, acheminement, livraison), usant de téléphones différents et de cartes SIM belges et espagnoles.
Ce principe de précaution se traduisait aussi par des renouvellements réguliers de téléphones, un système de doubles plaques pour chaque véhicule, l'utilisation de brouilleurs, de détecteurs de surveillance électronique et de codes alphanumériques pour leurs messages téléphoniques.
Les dealers effectuaient leurs livraisons aux grossistes en rase campagne, dans des zones dégagées pour éviter toute surveillance policière.
- En cavale -
Conscients de ces obstacles, dans l'incapacité de placer des micros ou des instruments de géolocalisation, les gendarmes ont effectué un travail extrêmement minutieux sur la base des écoutes téléphoniques, du bornage des téléphones, de clichés pris sur des autoroutes, allant même jusqu'à relever des empreintes sur des tickets de péage.
Pour les enquêteurs, Kamel Messaoudi et Bouchaib El Kacimi sont les deux cerveaux du réseau, qui achetait entre 1.400 et 1.500 euros le kilo de cannabis en Espagne. Le prix de vente moyen au détail est estimé en France à 6.000 euros le kilo, selon un rapport publié en juin 2013 par l'Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT).
Considéré comme le coordinateur du réseau en France, Kamel Messaoudi a toujours assuré n'avoir été qu'un exécutant et évoqué des "commanditaires" dont il n'a jamais voulu révéler l'identité, tout en précisant que Bouchaib El Kacimi n'en faisait pas partie. Au moment de son interpellation, il était également recherché pour une autre affaire de stupéfiants, qui lui a valu une condamnation en appel à huit ans d'emprisonnement, en octobre 2010.
Bouchaib El Kacimi, lui, a reconnu avoir mis sur pied le transport de cannabis vers la France, grâce à des contacts opérant en Espagne, et s'est même présenté comme l'un des commanditaires de Kamel Messaoudi.
Tandis que Kamel Messaoudi était incarcéré, de même que d'autres accusés, Bouchaib El Kacimi a bénéficié d'une libération sous contrôle judiciaire, en juillet 2011, du fait d'un vice de procédure qui a fait scandale. Il est depuis, en cavale, et se déplacerait, selon les enquêteurs, assez librement au Maroc.
Outre Bouchaib El Kacimi, un autre accusé, un convoyeur, est en fuite. Cinq accusés, dont Kamel Messaoudi, comparaîtront détenus.
AFP