Etats-Unis: Le cannabis, fin du tabou

Soft Secrets
31 Jul 2014

Finis les murmures...


Finis les murmures...

Plus d'un tiers des adultes américains en ont fumé, y compris les trois derniers présidents. Elle a inspiré des dizaines de chansons et de films. On n'a plus à en parler à voix basse ou à la dissimuler dans des arrière-salles ou les sous-sols. Malgré des décennies de prohibition, la marijuana est entrée dans le quotidien des Américains. 

Quand le comité de rédaction du New York Times a appelé le gouvernement fédéral à cesser d'interdire la marijuana [dans son éditorial du 27 juillet] et à laisser les Etats décider de sa réglementation, le quotidien relayait le point de vue exprimé sondages après sondages par la majorité des Américains : la marijuana devrait être légale.

"Le coût social des lois sur la marijuana est très élevé, peut-on lire dans l'éditorial du New York Times. En 2012, il y a eu 658 000 arrestations pour détention de marijuana, selon les chiffres du FBI, contre 256 000 pour possession de cocaïne, d'héroïne ou de leurs dérivés. Pis encore, une telle politique aboutit à des effets racistes, les jeunes Noirs étant les premiers visés : leurs vies sont gâchées et l'on crée de nouvelles générations de criminels".

Revirement culturel 

Depuis une dizaine d'années, ceux qui soutiennent la légalisation de la marijuana sont de plus en plus nombreux. Le phénomène s'est amplifié ces deux dernières années, à tel point que militants et sondeurs l'ont comparé à l'effondrement soudain de l'opposition au mariage homosexuel. Dans les deux cas, on peut parler d'un revirement culturel.
En 2012, quand le Colorado a légalisé l'usage récréatif de la marijuana par voie référendaire, les habitants de l'Etat ont été plus nombreux à voter pour le cannabis légal que pour le président Obama (qui l'a emporté d'une courte tête face à Romney). Dans l'Etat de Washington, le projet de légalisation a également été adopté haut la main.
Pourtant, en utilisant à la fois les référendums, la législation et les actions en justice, le mariage homosexuel a remporté un bien plus grand succès à travers l'ensemble des Etats-Unis.

La fin d'une nouvelle prohibition

Pour la marijuana, une meilleure comparaison historique est la prohibition, période du début du XXe siècle pendant laquelle l'alcool a été interdit. Les pouvoirs publics ont évolué plus lentement sur le cannabis. Bien souvent, ils ont pris des mesures progressives comme la dépénalisation de la possession de petites quantités de drogue ou la légalisation de son emploi médicinal.
Le tabou a lentement reculé. L'ancien président démocrate Bill Clinton a avoué avoir fumé de la Marijuana mais il s'est empressé de préciser qu'il n'avais pas inhalé. L'ex-président républicain George W. Bush a avoué à un ami lors d'une conversation enregistrée qu'il ne voulait pas répondre à de questions sur son ancien usage de la marijuana, car il ne voulait pas "qu'un jeune fasse ce que [j'ai] essayé". Obama, lui, a été plus audacieux, déclarant avant même d'être élu : "Bien sûr que j'ai inhalé - sinon, ce n'était pas intéressant !"
Dans une interview au New Yorker publiée en janvier, Obama a affirmé qu'à ses yeux ce n'est "pas plus dangereux que l'alcool". Mais il craignait qu'en autorisant la marijuana on ne s'engage sur un terrain glissant pouvant aboutir à la légalisation de drogues plus dangereuses.
L'American Medical Association (AMA), tout en appelant à davantage d'essais cliniques, doute que la marijuana médicale réponde aux critères de sécurité fédérale pour les prescriptions. De son côté, l'American Psychiatric Association (APA), dans son plus récent communiqué, rappelait que dans l'état actuel des connaissances scientifiques "rien ne permet d'affirmer que la marijuana puisse servir en quoi que ce soit dans le traitement d'aucun trouble psychiatrique".
Certains craignent également qu'en légalisant le secteur de la marijuana on ne suscite l'apparition de nouveaux géants qui seraient l'équivalent de ceux du tabac, tout en faisant grimper les taux de dépendance et de troubles psychiques.

Une expérience sociale

Dans l'Etat de Washington, où des points de vente de marijuana ont ouvert le 8 juillet, les élus affirment qu'il est encore trop tôt pour tirer des conclusions.
L'avocate Alison Holcomb, l'un des auteurs de l'Initiative 502 [référendum d'initiative populaire], estime que "dans l'Etat de Washington, les choses ont l'air d'aller tout à fait dans le bon sens". Dès les dix premiers jours, souligne-t-elle, les ventes ont généré 318 000 dollars de recettes fiscales.
Holcomb ajoute qu'en 2012, l'année de l'adoption de l'Initiative 502, les forces de l'ordre avaient effectué dans tout l'Etat 5 531 arrestations en rapport avec la marijuana. En 2013, ce chiffre avait été ramené à 120.
"J'ai appelé tous les gouverneurs à avancer prudemment sur cette question, parce qu'il y a des risques que nous commençons seulement à mesurer, a affirmé, en juin, John Hickenlooper, le gouverneur démocrate du Colorado, avant d'ajouter : mais cela va être l'une des grandes expériences sociales du XXIe siècle".
Source :  http://www.courrierinternational.com

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