Dépénalisation du cannabis: quels résultats à l'étranger?
Légalisation peu répandue mais tolérance à la hausse
Légalisation peu répandue mais tolérance à la hausse
L’arrestation lundi soir à Tunis d’Azyz Amami et Sabri Ben Mlouka a relancé le débat sur la répression du cannabis. Alors que la Tunisie sanctionne avec fermeté toute consommation, d’autres pays ont choisi d’adopter une politique radicalement opposée.
La légalisation encore peu répandue, mais la tolérance à la hausse
A l’heure actuelle, seuls l’Uruguay et les Etats de Washington et du Colorado aux Etats-Unis ont légalisé la culture, l’achat et la consommation de marijuana.
Un marché qui reste cependant encadré de près, les consommateurs uruguayens étant inscrits sur un registre d’usagers. De leur côté, les Etats américains voisins restent vigilants sur "l’expérience" de leurs homologues.
L’emblème et précurseur de la tolérance cannabique est bien sûr les Pays-Bas. L’encadrement du marché de la marijuana a débuté dès 1976 alors que la plupart des pays se mettaient à la répression. La possession, la culture et l’achat ne sont pas légaux mais sont tolérés. La vente n’est autorisée que dans les coffee-shops.
Le Portugal a dépénalisé depuis 2001 la consommation de cannabis. L’achat et la possession sont tolérés en cas d’usage personnel. C’est également le cas de l’Espagne et de la République tchèque qui ont autorisé la consommation et la détention de marijuana à usage récréatif.
Le cannabis médical
Les pays autorisant le cannabis dans le cadre d’un usage thérapeutique sont de plus en plus nombreux.
10 pays prescrivent des ordonnances pour la consommation de marijuana. La pratique tend à devenir de plus en en plus populaire, les vertus de l’herbe étant reconnues pour soulager les effets secondaires de nombreux traitements.
Perspectives séduisantes
Les partisans de la légalisation du cannabis avancent des arguments souvent attrayants. Elle permettrait d’abord de réduire drastiquement le nombre de délinquants incarcérés.
En Tunisie, où la consommation de haschisch est punie d’au moins un an d’emprisonnement, un tiers des prisonniers le sont pour infraction aux stupéfiants – la grande majorité d’entre eux pour consommation. Le système carcéral subit de plein fouet cette surpopulation, qui engendre un coût loin d’être négligeable pour les finances publiques, en plus de mettre dans la même cellule de "simples" fumeurs avec de véritables criminels.
Toujours au niveau financier, encadrer et taxer la vente de cannabis permettrait de remplir les caisses de l’Etat. En France, les revenus d’une légalisation sont estimés à 1 milliard d’euros, un montant dont ne bénéficieraient plus les narcotrafiquants.
Des inconnues demeurent
La dépénalisation apporterait des avantages indéniables mais l’incertitude persiste sur certains points.
Parmi les inquiétudes figure l'éventuelle augmentation de la consommation de cannabis dans la population. Si les risques concernent surtout les forts consommateurs, ils ne sont pas à négliger pour autant.
Mais à la différence du tabac, de l’alcool et de la plupart des drogues dures, le cannabis n’entraîne pas de dépendance physique. Le risque d’addiction est donc beaucoup moins élevé. Aux Pays-Bas, on comptait moitié moins de consommateurs de cannabis qu’en France en 2003 (proportionnellement à la population).
Une autre préoccupation concerne le déplacement du trafic vers les drogues dures. Privés de leur principale source de revenus, les trafiquants pourraient se tourner vers des stupéfiants beaucoup plus dévastateurs comme l’héroïne ou la cocaïne.
Mais au Portugal où le trafic de drogues a visiblement augmenté depuis la dépénalisation en 2000, la consommation de drogues dures reste inférieure à la moyenne européenne et a même diminué entre 2001 et 2006.
Dernière inquiétude: attirer, à l'instar des Pays-Bas, un "tourisme de la drogue". Les Hollandais ont commencé à interdire leurs coffee-shops aux étrangers sous la pression de l'Union européenne. L'économie touristique peut cependant être profitable.
Encadrer la vente et la consommation permettrait finalement de mieux surveiller les fumeurs. Concentrer les amateurs de cannabis dans certains endroits éviterait de déployer un nombre considérable de policiers pour traquer aveuglément le moindre usager de marijuana.
Les pays "laboratoires " que sont l’Uruguay, le Colorado et Washington donneront des informations cruciales concernant l’impact d’une légalisation du cannabis. Les résultats de pays étrangers comme la France montrent cependant l'inefficacité, tant au niveau économique que de la petite délinquance, de la politique du tout répressif
Source : http://www.huffpostmaghreb.com