Casser la loi pour sauver des vies

Soft Secrets
16 Feb 2012

Le cannabis à usage médicale, que ce soit légalement ou clandestinement, prend de plus en plus d'ampleur.


Le cannabis à usage médicale, que ce soit légalement ou clandestinement, prend de plus en plus d'ampleur.

Dans la plupart des pays, l'utilisation du chanvre est interdite même dans un but médical. L'automédication au cannabis a poussé un grand nombre de citoyens généralement respectueux des lois à entrer en conflit avec le système légal. Les patients sont souvent contraints à s'engager dans une lutte politique non seulement pour leur propre vie ou santé, mais aussi pour leur liberté. Les gens deviennent des criminels principalement à cause de la manière dont ils doivent procéder pour obtenir leur médicament. Volontairement ou non, ils deviennent souvent des citoyens militant pour leurs droits et des combattants pour la liberté. La lutte internationale pour obtenir aux malades et aux mourants l'accès au cannabis médicalement approuvé se poursuit depuis maintenant plusieurs décennies.

Robert Randall est le premier malade traité avec de la marijuana médicale aux Etats Unis depuis que la prohibition a commencé en 1937. A l'âge de 25 ans, il a appris qu'il serait aveugle vers les 30 ans mais il a finalement gardé la vue grâce à la marijuana et jusqu'à ce qu'il meurt du SIDA 28 ans plus tard. Forcé à transgresser la loi pour sauver sa vue, Bob a poursuivi le gouvernement fédéral pour obtenir un accès légal à la marijuana, et il a gagné. Il a ensuite continué à travailler sur le sujet pour d'autres malades. Randall a convaincu le juge qu'il était forcé de transgresser la loi parce que la marijuana l'aidait à ne pas devenir aveugle. En 1976, le juge de la cour suprême James A. Washington a estimé que le malade avait établi dans sa défense la nécessité médicale. Malheureusement, le programme fédéral qui permettait de fournir légalement du cannabis médical aux malades a rapidement été supprimé par le gouvernement. Randall a inspiré quantité d'autres militants pour la liberté médicale partout dans le monde. Keith Stroup, directeur exécutif de NORML l'appelait "le père du mouvement pour le cannabis médical". En 2011, le cannabis médical a été légalisé dans 15 Etats aux USA. La drogue est maintenant prescrite dans le cas de glaucomes, nausées, manques d'appétit et douleurs.

Woodward dénonce la manière dont le terme "marijuana" était utilisé pour volontairement confondre et embrouiller l'industrie et l'usage médical du chanvre.„

Dans leur livre Marijuana Rx: The Patients' Fight For Medicinal Pot (Marijuana sur ordonnance: le combat des malades pour le cannabis médical), Robert Randall et Alice O'Leary décrivent la situation des consommateurs de cannabis médical aux USA avec des mots durs: "Les bureaucrates ont la volonté d'arrêter, d'emprisonner, de rendre aveugles et même de tuer les personnes sérieusement malades uniquement pour conserver la "logique du message" de "tolérance zéro" et pour combattre "l'herbe du mal"". Il y a également un culte des produits de synthèse: seules les remèdes inventés et appartenant à de grandes sociétés sont les bienvenus; toutes les médecines naturelles qui sont faciles à cultiver à peu de frais et ne peuvent pas être brevetés représentent une menace pour le monopole des grandes firmes. Par exemple, un remède de synthèse contre les nausées utilisé par les malades de cancer suivant une chimiothérapie coûte 500$ la dose, généralement 1500$ par jour. En comparaison, la marijuana soulage mieux les nausées et coûte 50 centimes par jour. La conclusion des auteurs, c'est que les Américains doivent commencer à comprendre que le leur gouvernement est de plus en plus anti-démocratique et souvent régi par des menteurs et des escrocs. Dans les années 1970 et 1980, deux tiers des représentants législatifs de l'Etat ont reconnu la valeur médicale de la marijuana mais des guerriers anti-drogue non élus à Washington ont bloqué les efforts populaires de l'Etat. L'Avocat Général a menacé d'arrêter tout médecin qui oserait ne serait-ce que mentionner l'usage médical de la marijuana à un malade. Le gouvernement a également proposé de bannir toutes les recherches sur les bénéfices de cette plante interdite.

Malgré toute la propagande, les lois strictes, la répression et le déni des gouvernements, les malades ont continué à découvrir les pouvoirs guérisseurs du chanvre et à l'utiliser. Ils ont fait confiance à leur intuition, aux traditions populaires et aux rumeurs. Récemment, divers experts indépendants ont commencé à remarquer que les masses avaient vu juste dans ce remède populaire célèbre mais illégal.

David R. Ford dit dans son livre Marijuana: Not Guilty As Charged (Marijuana: accusée mais pas coupable) qu'instiller une fausse peur dans le cœur des citoyens est immoral et refuser la marijuana à des personnes malades est criminel. L'interdiction de ce médicament pratiquement inoffensif et qui n'a jamais tué personne est hypocrite alors que des drogues dangereuses comme l'alcool sont légales. Ford note qu'aux Etats unis, les médecins prescrivent environ 50.000 médicaments dont un bon nombre peuvent provoquer la mort ou des effets secondaires sérieux. Et il leur est interdit de prescrire des préparations non toxiques à base de cannabis. Ford pense que de nombreux participants à la croisade anti-marijuana qui ont honnêtement conclu que la marijuana est mal, ont eu un lavement du cerveau pour en arriver là, car peu de personnes peuvent être intentionnellement aussi cruelles. Comme Stanley Milgram, un psychologue et expert des questions de désobéissances civiles de Yale a écrit que des personnes ordinaires, faisant simplement leur travail, sans hostilités particulières de leur part, peuvent devenir des agents d'un processus terriblement destructeur.

Franklin C. "Lyn" Nofziger, ancien président-député du Comité National Républicain et conseiller à la Maison Blanche pendant les présidences de Richard Nixon et Ronald Reagan, a soutenu le mouvement pour la marijuana médicale. Selon lui, un médecin devrait avoir le droit de posséder tous les médicaments possibles dans son arsenal. Si des médecins peuvent prescrire de la morphine et d'autres médicaments pouvant causer des dépendances, il n'y a aucune raison de refuser de la marijuana à des personnes malades ou mourantes. Certains politiciens ont commencé à réaliser qu'il pouvait sembler cruel et inapproprié au public qu'on traite des malades et des mourants comme s'ils étaient la cheville ouvrière du cartel de la drogue. Et surtout, c'est un total gaspillage de l'argent des contribuables.

Des votes ont montré que 80% des Américains étaient pour l'usage du cannabis dans un but médical (enquête du Time/CNN, 2002). Howard Zinn, auteur de A People's History of the United States (Une histoire populaire des Etats Unis), écrit que très souvent, le gouvernement est amené à faire des réformes par la désobéissance civile organisée par les citoyens. Il y a une centaine d'années, c'est la suppression du travail des enfants, le droit de vote des femmes, la fin de la ségrégation raciale, la journée des huit heures de travail ou le droit de s'organiser qui étaient des idées radicales pour de nombreux Américains. Aujourd'hui, les combattants pour la liberté médicale provoquent un bouleversement social similaire.

Des médecins expriment régulièrement leur opinion selon laquelle la guerre contre les drogues est devenue une guerre contre les médecins et leurs patients. La cible est souvent comparée aux chefs de l'empire criminel. La DEA a sérieusement enquêté et poursuivi des milliers de médecins au nom de la guerre contre la drogue. Et ce sont des médecins qui se sont trouvés aux frontières de cette guerre dès le début: une des rares voix raisonnables durant les auditions de la commission sur la marijuana de 1937 était celle de l'Association Médicale Américaine (AMA). Leur conseiller législatif, William Woodward, a exposé un ensemble de témoignages devant le Congrès en les priant de ne pas faire passer cette loi. Woodward dénonce la manière dont le terme "marijuana" était utilisé pour volontairement confondre et embrouiller l'industrie et l'usage médical du chanvre, et a demandé pourquoi cette loi avait été préparée en secret depuis deux ans sans prévenir la profession. Plus tard, ses déclarations ont été ignorées et oubliées: la prohibition du cannabis a été actée. Woodward a déclaré qu'aucun médecin n'identifierait cet acte avec un médicament avant de le lire complètement parce que la marijuana n'est pas une drogue mais seulement un nom donné du cannabis.

L'AMA a défendu le cannabis en 1937 et le défend toujours aujourd'hui. En 2099, l'AMA a officiellement demandé au gouvernement fédéral de revoir les statuts du cannabis dans le Programme I de l'Acte de contrôle des substances. La plus grande association médicale américaine a une fois encore affirmé les intérêts médicaux de la marijuana et ses composants, les cannabinoïdes. De nombreux médecins américains continuent à recommander la marijuana à leurs patients même si ainsi, ils courent le risque de se retrouver en prison et de ruiner leur carrière.

Docteur John P. Morgan, professeur de pharmacologie à l'Université de New York, a exprimé ses pensées selon lesquelles les objectifs du gouvernement dans la régulation des médicaments étaient de protéger les malades contre les substances toxiques. La marijuana, toutefois, n'a pas de taux d'overdose. Le Docteur Morgan est également membre du NORML. Un autres des membres éminents du NORML est le Professeur Kary Mullis qui a reçu le prix Nobel de Physiologie et Médecine en 1993. Le NORML a aidé à ce que le cannabis soit reconnu et accepté comme un médicament dans les lois fédérales, une réussite énorme qui n'a pas été obtenue facilement. En 1972, le NORML a lancé une pétition adressée au gouvernement pour reclasser le cannabis du Programme I au Programme II pour que les médecins puissent le prescrire comme un médicament. En 1988, finalement, la DEA a réagi quand son propre juge du bureau légal, Francis Young, a conclu page 69 de son rapport: "... en termes strictement médicaux, la marijuana est de loin plus sûre que de nombreux aliments que nous consommons." Après deux ans d'auditions, la DEA a rejeté les recommandations de son propre juge.

Trop souvent, les malades doivent prendre le risque de perdre leurs droits, leur liberté, leurs biens et leurs enfants, uniquement parce qu'ils utilisent le médicament le plus sûr connu en médecine.

Le Docteur Lester Grinspoon, auteur de "Marijuana: The Forbidden Medicine" (Marijuana: la médecine interdite) signale qu'une montagne de preuves venant de milliers de malades est ignorée sciemment et que des expériences cliniquement contrôlées ne sont pas encouragées. Des preuves anecdotiques ont été acceptées dans le monde médical dès la seconde moitié du 20ème siècle et l'invention de la méthodologie scientifique moderne des études en double-aveugle. Cependant, de grandes études en double-aveugle sont quasi impossibles à mener à cause de la loi. Pour ne citer qu'un exemple, il a fallut 4 ans au Docteur Donald Abrams pour obtenir l'autorisation d'étudier les effets de la marijuana sur les douleurs neurologiques liées au SIDA.

Malgré les évidences de l'intérêt du cannabis dans le traitement de maladies graves et bénignes, la DEA sous la loi fédérale continue à arrêter des malades et des soignants, même dans des Etats qui ont essayé de protéger légalement l'usage de la marijuana par leurs propres lois. Le malade, l'impotent et le mourant sont régulièrement confrontés à des armes lors des raids et des arrestations. Ils sont parfois abattus et souvent condamnés à des années de prison. Certains malades ont essayé de se suicider, incapables de vivre sans leur médication. Des victimes du cancer, du SIDA et autre ont témoigné du pouvoir du cannabis à les ramener littéralement de l'article de la mort. Les personnes souffrant de glaucomes sont terrorisées à l'idée de devenir aveugles sans leur traitement. Trop souvent, les malades doivent prendre le risque de perdre leurs droits, leur liberté, leurs biens et leurs enfants, uniquement parce qu'ils utilisent le médicament le plus sûr connu en médecine. Nombre d'entre eux meurent en prison, privés de leur traitement comme c'est souvent le cas pour des personnes malades du cancer ou du SIDA. Ils sont autorisés à prendre de la morphine, mais pas du cannabis. Des personnes malades avec toutes sortes de parcours craignent d'être jetées en prison à cause du médicament qu'elles utilisent. Elles ressentent l'interdiction de l'usage médical de la marijuana comme une énorme injustice sociale dans l'histoire de l'humanité.

Ceci est toujours aujourd'hui la dure réalité de la marijuana médicale dans de nombreux pays dans le monde. Les malades ont perdu leur cause à la Cour Suprême des Etats Unis; en 2005, un amendement pour stopper les arrestations de malades traités à la marijuana a également été refusé au Congrès. Le cannabis est resté dans le Programme I des substances contrôlées "sans valeur médicale", la catégorie la plus restrictive qui comprend également l'héroïne. Des substances telles que les métamphétamines ont une valeur médicale suffisante pour se trouver dans le Programme II. Dans la loi fédérale, la marijuana est une drogue plus dangereuse que la cocaïne et le crack.

Certains pays européens comme le Royaume Uni, l'Espagne, la Suisse et l'Italie ont fait l'effort d'explorer les bénéfices d'un usage médical du cannabis. Aux Pays Bas, depuis 2003, on peut trouver du cannabis en pharmacie et un centre médical gouvernemental a été créé. En 2007, l'Allemagne a autorisé les premiers traitements médicaux au cannabis, des malades de sclérose en plaque ont pu acheter légalement de la marijuana. En 2008, la cour suprême de la République Tchèque a pris une décision en faveur de la culture du cannabis pour les usages médicaux.

En 2009, au Lichtenstein Palace de Prague, lors du 16ème gala du gouvernement tchèque pour les personnes handicapées présidé par le Premier Ministre et avec de nombreux ministres présents, un prix officiel a été remis à l'organisation Konopí Je Lék (Cures de cannabis) pour leur page web consacrée aux anciennes et nouvelles applications médicales du cannabis. Le ministre tchèque de la santé, Care Dana Jurásková a non seulement promis de participer au débat public sur le sujet mais également de soutenir l'introduction de la phytothérapie dans le système des soins de santé tchèque si les résultats sont prometteurs. Le ministre du travail et des affaires sociales, Petr Šimerka a présenté le président de la KJL Dušan Dvořák ainsi que le prix remporté et signé par le Premier Ministre tchèque, Jan Fisher. Dušan Dvořák a un jour été condamné à cinq ans pour la culture de plus de 800 plantes de cannabis.

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