Cannabis au volant : l’OFDT remet en cause les chiffres officiels

Olivier F
12 Aug 2023

L’Observatoire français des drogues et tendances addictives (OFDT) vient de publier un rapport sur le coût social des drogues. Le rapport compare le coût social de l’alcool, du tabac et des drogues illicites.


L’OFDT est un organisme public créé en 1993 qui s’appelait au départ « Observatoire français des drogues et toxicomanies. » Il est devenu en janvier 2022 « Observatoire français des drogues et tendances addictives ». L’OFDT se présente comme un organisme indépendant « L’OFDT observe le phénomène des drogues licites, illicites et les conduites addictives en France. Depuis le 1er juillet 2020, le champ d’action de l’OFDT s’est étendu aux jeux d’argent et de hasard. » L’Observatoire publie régulièrement des rapports sur le cannabis et les autres substances. Ces rapports sont disponibles en ligne.
 
Dans son nouveau rapport, l’OFDT estime le coût social des drogues licites et illicites en France. Le rapport est paru en juillet 2023 mais les données sont celles de 2019, la dernière année avant le Covid. « Les études de coût social visent à donner aux pouvoirs publics une indication du poids que représente un problème social pour la collectivité. » Le rapport a a été réalisé par le professeur Pierre Kopp de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
 
Pour définir le coût global, l’étude prend en compte le coût des vies humaines, la perte de productivité, les dépenses de santé, la prévention, la répression… Pour l’année 2019, le coût social du tabac a été estimé à 156 milliards d’euros, celui de l’alcool à 102 milliards et le coût des drogues illicites à seulement 7,7 milliards d’euros.
 
L’OFDT remarque la différence entre les chiffres de la mortalité sur la route liée au cannabis et ceux de la précédente étude de 2015. « Il existe une différence notable concernant la mortalité routière engendrée par le cannabis. Dans l’étude publiée en 2015, il apparaissait que 230 personnes étaient décédées à la suite d’un accident routier impliquant une consommation de cannabis. Ce chiffre issu des données disponibles (Laumon et al., 2011) à cette période n’est pas repris dans la présente étude. En effet, le bilan 2019 de la sécurité routière recense 731 décès dans un accident de la route impliquant un conducteur testé positif aux stupéfiants et 3 604 blessés dans un accident de la route impliquant un conducteur avec test positif aux stupéfiants. »
 
En effet, les tests de détection du THC ne permettent pas de savoir si la personne était sous l’emprise du cannabis au moment de l’accident. « Ces décès ne sont pas directement imputables au cannabis, puisqu’une personne peut avoir consommé du cannabis jusqu’à plusieurs semaines avant la date du décès et voir son test apparaître positif. À la différence de l’alcool, dont il est possible de doser la quantité et qui disparaît en 24 heures du sang, le cannabis n’est pas dosable par un test rapide et laisse une trace durable (ONISR, 2020). Il est alors erroné d’imputer tous les décès avec tests positifs au cannabis. »
 
L’étude remarque que certains décès sont imputés à la consommation de cannabis alors qu’aucun lien entre la prise de cannabis et le décès n’a pu être prouvé « Le coût social des drogues illégales ne baisse que de 6 % alors que la mortalité baisse de 23 %. Ce hiatus n’apparaît pas dans les cas de l’alcool et du tabac où la mortalité et le coût social baissent de manière parallèle. L’explication tient au fait que la mortalité routière engendrée par le cannabis était évaluée à 230 décès en 2015, ce qui était surévalué car les données disponibles ne mesurent que le nombre de personnes décédées qui étaient positives au cannabis sans que la causalité entre le décès et la prise de cannabis puisse être établie. Le nombre de morts imputables aux drogues illégales est donc largement revu à la baisse. »
 
Ce sont bien ces chiffres contestés sur lesquels se basent les prohibitionnistes comme Macron ou Darmanin pour justifier l’interdiction totale du cannabis.
 
En dehors de la mortalité routière, l’étude estime que 1230 personnes sont décédés à cause des drogues illicites en 2019 :  VHC (virus de l’hépatite B) : 543, substitution aux opioïdes : 266,  héroïne : 147, cocaïne : 110, autres psychotropes : 104, sida : 27 et cannabis : 33. L'étude estime le nombre de décès à cause du tabac à 73.000  et à 41.000 pour l'alcool.
 
Là encore, l’auteur remarque que le nombre de décès liés au cannabis a été surestimé. « Il convient de noter que les 33 décès " cannabis " proviennent de l’étude DRAMES (CEIP-A Grenoble, 2021). Dans 19 cas parmi les 33, le cannabis a été imputé comme cause principale associée au décès. Il s’agit des cas où la cause du décès est une pathologie cardiovasculaire connue ou révélée à l’autopsie, aggravée par le cannabis, mais pas causée en propre par ce produit. À nouveau, le risque d’imputation infondée des décès au cannabis doit être remarqué, il a donc été convenu de ne pas les prendre en considération. »

Téléchargez le rapport de l'OFDT sur le coût social des drogues

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Olivier F