Floraison et photopériode - Jongler avec la durée du jour

Soft Secrets
25 Jun 2018

Une des premières choses que le cultivateur apprend, c’est que le cannabis est une plante à journée courte, ce qui veut dire qu’il fleurit quand les nuits atteignent une certaine durée.


Aujourd’hui, ce n’est plus vrai que pour une partie des plantes, vu que les génétiques automatiques développées ces dernières années peuvent fleurir sous n’importe quelle photopériode. Quoi qu’il en soit, la durée des jours et des nuits a de nombreuses implications sur la culture, et sa manipulation permet d’avancer ou de retarder la floraison des plantes et d’ainsi optimiser la production de la récolte et la qualité des têtes. Les techniques de modification de la photopériode pour changer la floraison se basent principalement sur deux concepts : allonger les nuits, ou les raccourcir. Ou on tente d’obtenir des nuits suffisamment longues pour qu’elles déclenchent la floraison à une époque où les plantes ne fleurissent pas naturellement, ou on cherche à éviter que les nuits ne soient assez longues pour que les plantes fleurissent. En bref, on tente de maintenir une plante en état de croissance à un moment où elle fleurirait dans une photopériode naturelle. [caption id="attachment_68285" align="alignnone" width="500"] Plantes forcées fleurissant début juin, au moment de la récolte, elles mesureront environ un mètre.[/caption] [caption id="attachment_68286" align="alignnone" width="500"] Sativa en juin, deux semaines avant de commencer à forcer la floraison.[/caption]

Empêcher la floraison prématurée

Au début du printemps, les nuits sont assez longues pour qu’une bouture qui a grandi en intérieur sous la photopériode habituelle de croissance de 18/6 puisse se mette à fleurir dès qu’on la place à l’extérieur. A ce moment, le changement de photopériode consiste à éviter cette floraison prématurée en allongeant la durée du jour, ou en interrompant la durée de la nuit. Les deux systèmes se valent, mais le deuxième est plus utilisé parce qu’il est simple. Il suffit d’allumer une lampe au milieu de la nuit pendant quelques minutes pour que les plantes remettent leur compteur à zéro. Donc, deux périodes de 7 heures d’obscurité séparées par quinze minutes de lumière ne provoquent pas la floraison des plantes, alors que c’est le cas avec 14 heures d’obscurité ininterrompue. L’une des solutions les plus efficaces pour éviter tout risque quand on sort à l’extérieur des boutures qui ont grandi en intérieur sous une photopériode de 18/6 est de placer près des plantes une lampe connectée à une minuterie qui la fera s’allumer un moment pendant la nuit. Comme il ne s’agit que de couper la nuit pour que les plantes ne restent pas dans l’obscurité plusieurs heures de suite, il suffit que la lampe s’allume pendant dix minutes. Il n’est pas nécessaire d’utiliser une lampe spéciale pour la culture, une simple ampoule suffira. Mais toutes les plantes doivent recevoir la lumière, attention à celles qui sont les plus éloignées de l’ampoule. Si elles restent dans l’obscurité, elles fleuriront. Si les boutures croissent en intérieur sous une photopériode de 18/6 et sont placées à l’extérieur en mars ou début avril, elles fleuriront prématurément. Pour ce qui est du mois de mai, tout dépendra du moment (début ou fin du mois) et du type de génétique dont il s’agit. La plupart des variétés Sativa et les hybrides avec une grande proportion de Sativa n’auront pas de problème et continueront à grandir. Par contre, certaines variétés Indica pourraient être affectées par le changement de photopériode et commencer à fleurir. En mai, les jours s’allongent rapidement, les plantes n’arriveront donc pas à terminer leur floraison. Quelques semaines plus tard, elles reprendront la phase de croissance mais en ayant perdu un temps précieux. Par ailleurs, quand une plante commence à fleurir prématurément, même si elle s’arrête et recommence à grandir, elle n’atteint pas son développement et son rendement maximum. Quand on se demande si les boutures vont commencer à fleurir, je recommande de couper les nuits pendant tout le mois de mai pour ne courir aucun risque. En sachant que le fait d’empêcher la floraison prématurée des boutures est très simple et qu’il suffit d’une ampoule et d’une minuterie qui la fait s’allumer un quart d’heure au milieu de la nuit. [caption id="attachment_68287" align="alignnone" width="500"] Les plantes mesurent la durée des jours par la pointe de leurs branches, il ne faut pas les couper à un moment proche de la floraison si on ne veut pas que celle-ci soit retardée.[/caption]

Forcer la floraison

En mai, juin et juillet, les nuits sont trop courtes pour que les plantes fleurissent. Les cultivateurs qui veulent forcer la floraison allongent la durée des nuits, soit en déplaçant les plantes dans une pièce sombre chaque soir, soit en couvrant leur serre pour l’obscurcir. Pour certaines variétés, des nuits de dix ou onze heures peuvent être suffisantes, mais pour s’assurer que toutes les plantes fleurissent indépendamment de leur génétique et de leur lieu d’origine, il est plus sûr qu’elles aient des nuits de douze heures, comme en culture d’intérieur. Dans certains cas, il est préférable que les nuits soient encore plus longues. Selon mon expérience, avec 13 heures d’obscurité quotidiennes, la floraison se produit une semaine plus tôt et on perd très peu de production par plante. Forcer la floraison présente un avantage important : cela permet que les plantes fleurissent au moment qui convient le mieux au cultivateur. Si on veut partir en vacances au mois d’août, il suffit de forcer les plantes pendant le mois de mai (au début pour les Sativas, fin du mois pour les Indicas) et la récolte sera terminée fin juillet. Pour éviter les pluies de mi-septembre qui font pourrir les têtes, il suffit de forcer les plantes fin juin. En plus de pouvoir contrôler la date de récolte et de pouvoir éviter la météo défavorable de la fin de l’été ou du début de l’automne, le fait de forcer la floraison a un avantage supplémentaire : les plantes fleurissent quand le soleil se trouve le plus près de la terre et que la lumière est la plus intense. La maturation et la production de résine sont incroyables! La floraison sous photopériode naturelle se produit peu à peu, puisque le changement de durée des nuits et des jours n’est pas subit. Quand on force la floraison, les plantes subissent une augmentation brusque de la nuit, comme en culture d’intérieur, qui les fait fleurir de façon immédiate et soudaine. Environ deux semaines après le changement de photopériode, les plantes sont en pleine floraison, produisent des fleurs sans s’arrêter et même si elles s’étirent en hauteur, ce n’est pas autant que quand le changement de photopériode est progressif. Selon mon expérience, les plantes forcées doublent à peine leur taille pendant la floraison. Alors qu’il n’est pas rare que les plantes qui fleurissent naturellement voient multipliée par trois ou quatre la taille qu’elles avaient avant de commencer la floraison. La technique la plus courante pour forcer la floraison d’un petit nombre de plantes est de les placer pendant 12 heures par jour dans un lieu sombre, une armoire ou une pièce fermée. Ce système est très efficace et il ne coûte rien en matériel. Il est juste assez contraignant puisqu’il faut changer les plantes de lieu chaque matin et chaque soir. Ce système ne fonctionne évidemment pas si les plantes sont grandes, nombreuses ou mises en terre. Dans ces cas, on recouvre les plantes d’un plastique ou d’une toile qui ne laisse pas passer la lumière, sans devoir les changer de place. Certains cultivateurs choisissent de faire directement se développer leurs plantes dans une serre qu’ils couvrent et découvrent chaque jour. Avec un moteur, une minuterie et un peu d’ingéniosité, on peut créer un système pour couvrir et découvrir automatiquement les plantes tous les jours. [caption id="attachment_68288" align="alignnone" width="500"] Le soleil intense de juin et de juillet favorise la production de résine.[/caption] [caption id="attachment_68289" align="alignnone" width="500"] Les plantes forcées filent moins en hauteur pendant la floraison.[/caption]

Génétique et photopériode

Le lieu d’origine de chaque variété cannabique détermine sa réaction face à la photopériode. Les espèces qui viennent de zones équatoriales, toutes Sativas, vivent sous une photopériode qui varie très peu au cours de l’année. Le jour le plus long de l’année dure souvent à peine treize heures, et les nuits ne dépassent jamais 11 heures. Ces variétés ont souvent besoin de nuits d’au moins onze heures pour commencer à fleurir, ce qui ne se produit pas sur la péninsule ibérique avant début septembre. Si ces variétés finissent leur maturation très tard, c’est parce qu’elles la commencent tard. Les variétés Indicas ou les hybrides plus rapides et plus précoces se contentent de nuits plus courtes, 10 heures (ou moins) leur suffisent et elles peuvent commencer à fleurir au moins un mois avant les Sativas. En plus du fait que leur floraison est plus courte et qu’elle commencent plus tôt, les variétés Indicas peuvent être prêtes à être récoltées jusqu’à deux mois avant les Sativas. [caption id="attachment_68290" align="alignnone" width="500"] Les variétés automatiques donnent les meilleures récoltes pendant les mois où les jours sont les plus longs.[/caption]

Semis tardif de Sativas

Nous avons vu que de nombreuses variétés Sativas commencent à fleurir beaucoup plus tard que leurs cousines Indicas, parce qu’elles ont besoin de nuits plus longues. Si on sème les Sativas au même moment que les Indicas, elles ont une croissance beaucoup plus longue et commencent donc à fleurir plus tard. De plus, les Sativas s’allongent plus pendant la floraison et sont donc beaucoup plus grandes que les Indicas. Si les Sativas sont plantées en terre et ont assez d’espace, il n’y a pas de problème à les semer en avril ou en mai. Par contre, si elles sont plantées en pots, il vaut mieux les semer plus tard, en juin ou même en juillet. Les variétés Sativas qui ont une très longue floraison, comme les thaïlandaises ou les Haze peuvent être semées jusqu’à début août. Si elles reçoivent les soins adéquats, elles auront tout le temps de se développer et garderont une taille raisonnable.

Autofleurissantes et photopériode

Les variétés automatiques ne fleurissent pas en fonction de la photopériode, mais selon leur âge. En général, elles commencent à fleurir trois ou quatre semaines après avoir germé, indépendamment de la durée des jours. Ce sont des variétés qui sont issues de descendantes d’hybrides entre des plantes non autofleurissantes de Cannabis Sativa, avec des plantes autofleurissantes de Cannabis Ruderalis. Par la sélection et les croisements, on obtient des variétés à floraison automatique comme la Ruderalis, mais avec une psychoactivité d’Indica ou de Sativa. Les autofleurissantes apprécient particulièrement les photopériodes avec plus d’heures de soleil, vu leur cycle de vie court. Ce sont des variétés à développement très rapide. La majorité des automatiques étant prêtes à être récoltées huit à douze semaines après leur germination, alors qu’une plante non autofleurissante qui a été semée en mai ne pourra être récoltée que cinq mois plus tard, en octobre. Si les deux ou trois mois de vie d’une autofleurissante ont cours entre mai et juillet, quand les jours sont les plus longs et le soleil le plus intense, la grande quantité d’énergie lumineuse dont la plante dispose lui permettra de produire plus que si elle avait été plantée à un autre moment. On peut aussi cultiver des variétés autofleurissantes en dehors de ces trois mois de journées longues, mais leur production sera moindre. En général, si tout va bien et si elles sont cultivées dans des conditions similaires, la production des plantes est directement proportionnelle à la durée des jours. En plein hiver, quand les jours durent dix heures et que le soleil ne chauffe pas, il est inutile de tenter de les cultiver en extérieur. En zones froides soumises aux gelées, les plantes mourront. Dans une zone plus chaude qui ne connait pas de gelées, les plantes survivront, mais elles grandiront très peu et ne donneront presque pas de bourgeons, à peine quelques grammes de mauvaise qualité. Ce n’est que dans des régions très chaudes comme les Iles Canaries ou certaines zones côtières du sud de la péninsule que la température hivernale est suffisamment élevée pour que les plantes fleurissent confortablement. Dans ces régions, surtout si on cultive sous serre, on peut obtenir une récolte tout à fait décente en semant beaucoup de plantes. Elles ne grandiront pas trop et la production de chacune sera faible, mais ça peut fonctionner, surtout si on trouve des graines automatiques gratuites ou bon marché et si on en sème beaucoup (jusqu’à dix plantes par mètre carré). La qualité des têtes ne sera pas extraordinaire, mais c’est mieux que rien quand on arrive au bout de ses réserves! En culture d’hiver, on peut obtenir les mêmes résultats avec des variétés autofleurissantes et non autofleurissantes puisque les longues nuits provoquent la floraison des deux types de plantes. Dans des régions où les hivers sont chauds et ensoleillés, en culture sous serre, si on combine la lumière naturelle avec quelques heures de lumière artificielle pour allonger la photopériode et qu’on maintient la température à l’aide d’un chauffage, on peut réussir une culture d’hiver et en tirer de bonnes productions. [caption id="attachment_68291" align="alignnone" width="500"] Les planches blanches de liège isolent les pots de la chaleur du sol.[/caption] [caption id="attachment_68292" align="alignnone" width="500"] La croissance des autofleurissantes est beaucoup plus lente quand elles reçoivent peu d’heures de soleil.[/caption] [caption id="attachment_68293" align="alignnone" width="500"] Les nouvelles automatiques combinent la floraison de la Ruderalis et la qualité de l’Indica.[/caption]

Lampes rouge lointain

Dans le spectre lumineux, le rouge lointain correspond à une radiation entre 700 et 800 nm qui se situe entre le rouge et l’infrarouge. Le rouge lointain a des effets importants sur le développement des plantes et sur leur floraison, qu’on ne commence à comprendre que depuis quelques années. Le début de la floraison du cannabis est déterminé par la quantité inactive de phytochrome. Le phytochrome est une protéine qui agit sur les plantes comme un interrupteur en leur permettant de mesurer la durée des jours et la présence de lumière solaire. Le phytochrome est un pigment photorécepteur sensible à la lumière de deux zones du spectre : le rouge (~667 nm) et le rouge lointain (~730 nm). Quand le phytochrome reçoit de la lumière rouge (comme c’est le cas pendant la journée) il prend immédiatement la forme active. Quand il se trouve dans l’obscurité, il prend peu à peu la forme inactive. Si on l’éclaire avec du rouge lointain, la forme active du phytochrome devient presque instantanément inactive. Selon le ratio phytochrome actif/phytochrome inactif au lever du jour, la plante calcule la durée des jours et des nuits et décide quand elle va commencer à fleurir. La lumière du soleil contient du rouge et du rouge lointain, mais la proportion de rouge est plus importante. A la tombée de la nuit, il se produit un changement du ratio rouge/rouge lointain dans la lumière du soleil et la proportion de rouge lointain augmente. Le phytochrome passe alors très rapidement à la forme inactive quand le soleil se couche. En intérieur par contre, l’obscurité arrive d’un coup, sans qu’il y ait de rouge lointain et le phytochrome passe lentement à la forme inactive, en une ou deux heures. C’est pour cela qu’en extérieur, les plantes commencent à fleurir quand les nuits durent dix heures, deux de moins que les nuits de la photopériode 12/12 qui est utilisée pour la floraison en intérieur. [caption id="attachment_68294" align="alignnone" width="500"] Plantes semées à des dates différentes mais qui seront récoltées en même temps, avec des tailles différentes.[/caption] [caption id="attachment_68295" align="alignnone" width="500"] Fleurs de Flores New York City Diesel forcée.[/caption] Certains cultivateurs de cannabis en intérieur ont déjà expérimenté des lampes rouge lointain et leur ont trouvé une certaine utilité. Leur usage le plus intéressant en culture d’intérieur est pour accélérer l’apparition de l’obscurité. Si on éclaire une culture d’intérieur avec une lampe rouge lointain pendant quelques minutes après avoir éteint les lumières, imitant ainsi le comportement de la lumière du soleil au crépuscule, tout le phytochrome prend presque immédiatement la forme inactive et fait croire à la plante que la nuit dure deux heures de plus. Il n’est donc plus nécessaire d’avoir une nuit aussi longue pour que les plantes commencent à fleurir. Cela permet par exemple, que la floraison se déroule sous une photopériode de 14/10 au lieu de 12/12. Les plantes fleuriront de la même façon, mais elles auront plus d’heures de lumière, et produiront donc plus de têtes. En théorie, l’usage de lampes rouge lointain pourrait aussi être très utile en culture d’extérieur pour que les plantes commencent à fleurir un peu avant leur floraison naturelle, puisque quelques minutes de rouge lointain ont le même effet sur les plantes que deux heures d’obscurité. En réalité, il y a déjà du rouge lointain à l’extérieur, l’effet ne sera donc pas le même qu’en intérieur. Si un cultivateur éclaire les plantes avec une lampe rouge lointain pendant quelques minutes après le coucher du soleil, les plantes croiront que les nuits sont plus longues que ce qu’elles ne sont réellement, mais elles ne se comporteront sans doute pas comme si il y avait deux heures d’obscurité de plus. Par exemple, une plante qui ne commence pas à fleurir avant le 1er août pourrait le faire le 15 juillet si elle reçoit ce “supplément d’obscurité” sous forme de lumière rouge lointain. Peu de cultivateurs ont déjà expérimenté ces techniques. Certains d’entre eux ont obtenu une petite avancée d’une ou deux semaines sur leur récolte en extérieur. [caption id="attachment_68296" align="alignnone" width="500"] Lumière verte en intérieur pour pouvoir travailler de nuit.[/caption]

La lumière verte

Les plantes sont vertes parce qu’elle reflètent cette partie du spectre lumineux. Elles absorbent le reste des couleurs mais elles reflètent le vert, qui est la partie du spectre la moins active au niveau de la photosynthèse, c’est-à-dire celle que les plantes utilisent le moins pour réaliser la photosynthèse. Comme le savent les cultivateurs d’intérieur, cette caractéristique permet d’éclairer les plantes avec une lumière verte pendant la nuit sans que cela affecte la floraison. Les espaces de culture sont généralement équipés d’une ampoule au cas où il faudrait travailler sur les plantes pendant les heures d’obscurité. Pour les cultures d’extérieur, une lampe à lumière verte peut être très utile s’il faut s’occuper des plantes pendant la nuit, surtout pendant les premières semaines de floraison, quand les plantes sont plus sensibles à l’interruption de l’obscurité nocturne. Les plantes sont peu sensibles au vert, mais elles n’y sont pas complètement insensibles. Il y a une différence entre regarder les plantes un moment à la lumière verte, et laisser une lumière verte allumée pendant la nuit. Dans ce dernier cas, la floraison peut en être affectée. José T. Gállego

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