L'Amérique latine face à la tentation du cannabis légal

Soft Secrets
03 Feb 2015

La petite graine semée par l'Uruguay...


La petite graine semée par l'Uruguay...

C'est une petite graine, semée par l'Uruguay fin 2013: la légalisation du cannabis commence à faire son chemin en Amérique latine, même si, dans cette région aux prises avec le narcotrafic, certains pays refusent toujours d'en entendre parler.

"Quelqu'un doit commencer en Amérique du Sud", avait dit le président uruguayen, José Mujica, en dévoilant son idée audacieuse.

Un an après la loi qui a fait du pays le seul au monde à réguler la production de marijuana, sa vente en pharmacies se fait toutefois encore attendre.

Mais, selon le Conseil national des drogues (JND), le pays de 3,3 millions d'habitants compte déjà 1.300 personnes inscrites comme auto-producteurs et six clubs de jusqu'à 45 consommateurs.
Ses voisins sont intrigués : "Comme l'Uruguay l'a fait et n'a pas encore souffert de graves conséquences négatives en termes de relations internationales, sanctions ou rejet au niveau domestique, c'est devenu une option à considérer pour les autres pays", explique John Walsh, analyste au "think tank" Bureau de Washington sur l'Amérique latine.

"Le cas de l'Uruguay a inspiré de nombreux pays à envisager au moins de faire quelques pas dans cette direction", renchérit Pien Metaal, experte du centre d'études Transnational Institute, à Amsterdam.

"Il n'y a plus de retour en arrière. (Le génie) est sorti de la bouteille et il n'y a plus moyen de le faire rentrer", observe-t-elle malicieusement.

Fin octobre, le Chili est devenu le premier de la région à cultiver à des fins thérapeutiques le cannabis, qui reste pourtant considéré là-bas comme une drogue dure. Un projet de loi veut dépénaliser sa culture à usage personnel.

En Colombie, le Parlement débat d'un projet permettant son utilisation médicale, avec le soutien du président de centre-droit Juan Manuel Santos.

En Argentine, un projet de loi défendu par le secrétaire général de la présidence, Anibal Fernandez, souhaite dépénaliser la culture à usage personnel mais le gouvernement reste contre. En projet aussi, la dépénalisation de la consommation et son usage thérapeutique.
Dans plusieurs pays de la région, la possession de drogue pour usage personnel n'est de toute façon pas sanctionnée.

- L'exemple des États-Unis -

Outre l'Uruguay, il y a, plus au nord, un autre cas emblématique, susceptible d'inspirer la région : celui des États-Unis.

Instigateur et soutien financier de la "guerre contre la drogue" (terme hérité du président Richard Nixon) sur le continent, le pays est confronté en son sein à des initiatives plus douces.
"Déjà quatre États ont régulé le cannabis à usage récréatif" (Washington, Colorado, Alaska, Oregon) et 23 l'ont légalisé à des fins médicales, souligne Pien Metaal.

"Cela décrédibilise un peu (les États-Unis) au moment de dicter aux pays d'Amérique latine, comme ils l'ont fait ces dernières décennies, leurs politiques en matière de drogue".

Après avoir prôné la prohibition, "il est temps que les États-Unis fassent preuve de cohérence avec les pays de la région et arrêtent de prêcher quelque chose qu'ils ne peuvent appliquer chez eux", juge le chilien Eduardo Vergara, directeur du centre d'analyses Asuntos del Sur.

Mais "la région reste divisée" et certains pays latinoaméricains freinent encore, fait-il remarquer.
"La légalisation des drogues n'est pas à l'agenda aujourd'hui", déclarait récemment le ministre brésilien de la Justice, José Eduardo Cardozo, malgré le dépôt de projets de loi en ce sens.
Même position au Nicaragua, Panama, Mexique, Costa Rica, Venezuela ou Pérou.
Certaines voix défendent pourtant la légalisation, comme les ex-présidents brésilien Fernando Henrique Cardoso et mexicain Vicente Fox.

Et la demande d'une nouvelle approche monte dans la région, première productrice mondiale de cocaïne, victime de la violence liée au trafic.

Le tout-répressif a "échoué", estime le président colombien. Un "échec complet" pour son homologue équatorien Rafael Correa. Sous l'impulsion de la Colombie, du Mexique et du Guatemala, l'ONU tiendra en 2016 une session spéciale sur ce thème.

Mais alors qu'aux États-Unis, la légalisation du cannabis est portée par un élan populaire, le changement prendra ici plus de temps.

"Le public est sceptique en Amérique latine: il n'est peut-être pas satisfait de la guerre contre les drogues, mais il tend à voir la légalisation comme permissive et défaitiste", explique John Walsh, rappelant que c'est notamment le cas en Uruguay.

Source : http://www.rtl.be/i

 

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