Femmes, enfants, plants de cannabis

Soft Secrets
20 Oct 2013

en prison comme chez eux


en prison comme chez eux

Des détenus de la prison de Sabaneta, protestant contre leur transfert et réclamant la sécurité pour les visiteurs, le 18 septembre 2013 . (Photo Jimmy Perela. AFP)

En vidant le centre pénitentiaire de Sabaneta, où 16 détenus s’étaient entre-tués en septembre, les autorités ont découvert une ménagerie et 56 enfants.

Deux vaches, huit chèvres, des lapins, des singes, deux petits jaguars, deux crocodiles… Les prisons vénézuéliennes réservent toujours des surprises. En vidant le centre pénitentiaire de Sabaneta, où 16 détenus s’étaient entre-tués à la mi-septembre, les autorités ont découvert un petit zoo, mais aussi des familles qui y vivaient à plein temps avec leurs enfants.

Selon Willmer Poleo Zerpa, du journal Ultimas Noticias, c’est en apprenant que les bambins n’allaient pas à l’école que la ministre des Affaires pénitentiaires, Iris Varela, a vu rouge. Ou peut-être en considérant les corps démembrés ou la panse ouverte d’un des chefs de gang, à qui le cœur avait été soutiré en guise de trophée. Le «pran» ou «leader négatif» vainqueur a bien tenté d’expliquer à la ministre qu’il ne s’agissait que d’affaires internes, ce n’est pas passé. Selon Iris Varela, 200 familles vivaient au milieu de 3 700 prisonniers – dans une prison conçue pour 750 personnes.

Il était déjà de notoriété publique que les détenus vénézuéliens avaient des discothèques, des piscines, des plans de cannabis et qu’ils géraient de véritables mafias bien au chaud derrière leurs murs, mais pas qu’ils pouvaient vivre en quasi-autogestion. Les signes étaient pourtant là. Dans la prison de Los Teques, au sud de la capitale, Caracas, les gardiens n’entrent plus depuis longtemps. Les détenus ont leur propre épicier, un vendeur de hamburgers et des artisans. Spécialisation du travail aidant, le «pran» s’assure de l’hygiène générale en assignant quelques prisonniers à la propreté. Devant la porte, les militaires observent passivement les jeunes filles en quête de tatoués qui font la queue devant le motel improvisé et les mères qui viennent rendre visite à leur mari ou à leur fils. Le matelas à la main, une bonne partie d’entre elles s’installent plusieurs jours. Pour embrasser papa, leurs chérubins doivent passer une forêt de kalachnikovs et autres joujoux locaux portés par des hommes au regard rendu translucide par les drogues, alors que d’immenses enceintes crachent du reggeaton à plein volume.

A Sabaneta, les 56 enfants jouaient dans la cour autour d’un Christ d’os criblé de balles, au milieu des animaux. En vidant la prison, les autorités ont retrouvé une centaine d’armes, dont la moitié de gros calibre, cinq grenades, deux mortiers… Les chiens, les perroquets et un raton laveur apprivoisé ont été rendus aux familles, le reste des animaux a été envoyé au zoo. Tous les détenus ont finalement été évacués ces derniers jours vers d’autres prisons. Certaines, plus modernes, sont sous contrôle policier, d’autres pas du tout.

Simon PELLET-RECHT correspondant à Caracas (Venezuela)

Source: http://www.liberation.fr
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