Cultiver en mer

Soft Secrets
04 Oct 2011

Suppose que tu peux choisir l'endroit idéal pour cultiver: où serait-il et comment ferais-tu pour t'assurer qu'il ne soit pas découvert? Grâce à l'attitude toujours plus dure de la police et du système légal de la plupart des pays, les cultivateurs sont forcés d'innover constamment. Leurs possibilités semblent illimitées. Dans cette série d'articles consacrée aux emplacements de rêve, je décrit comment ces possibilités se concrétisent, les pour et les contre de chacune d'entre elles et comment elles sont mises en place.


L'emplacement idéal pour cultiver du cannabis est un endroit où c'est légal, ou du moins, où ce n'est pas poursuivi. Un des rares endroits où ces conditions sont réunies, c'est dans les eaux internationales. C'est pour cela que pour ce numéro, nous allons faire la connaissance de Carlos avec qui nous allons nous familiariser tout au long de cet article. Carlos nous donne une vision des possibilités légales de cultiver du cannabis dans les eaux internationales.

“Les lois et les règles en mer sont l'œuvre d'une agence législative très importante au niveau mondial, l'Organisation des Nations Unies (ONU).„

La loi maritime internationale

71% de la superficie de la terre, approximativement, est de l'eau. La majeure partie de ce pourcentage sont les mers. Quelles sont les règles en vigueur en mer? Qui détermine réellement ces règles? En principe, les eaux internationales n'appartiennent à personne, comme le pôle Nord, ou l'air, ou l'espace. Les lois et les règles en mer sont l'œuvre d'une agence législative très importante au niveau mondial, l'Organisation des Nations Unies (ONU). L'Onu est composé de pratiquement tous les pays de la planète, c'est pourquoi une des ses tâches est d'approuver les normes globales. Au siècle passé, l'ONU a tenu une série de conférences qui ont donné lieu à la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (CNUDM). C'est la base de la législation maritime actuelle dans lesquelles s'intègrent les lois de la mer.

Dans la législation maritime, il y a une distinction entre les eaux territoriales et les eaux internationales. La plupart des pays mesurent les limites de leurs eaux territoriales à 12 miles nautiques (22 km) de la côte. Ces eaux territoriales appartiennent par conséquent aux pays adjacents. Plus loin que les eaux territoriales se trouve la zone contiguë; une limite de 12 miles nautiques sur lesquels s'appliquent les lois des pays auxquels ils appartiennent et qui les défini. Par exemple, en matière de circulation des personnes et de trafics de drogues. En-dehors de cette zone. Il y a la zone économique exclusive (ZEE). La limite de cette zone peut aller de la côte jusqu'à 200 miles nautiques (370 km) dans la mer. Dans la ZEE, chaque pays à le droit légal d'exploiter toutes les ressources naturels comme les poissons ou les réserves de pétrole; le droit de construire et d'utiliser des îles artificielles; et le droit d'y réaliser des recherches scientifiques. Les limites de la ZEE sont en partie déterminées par la localisation des pays voisins. La zone contiguë, la ZEE et tout le reste qui se trouve après cette limite sont considérés comme les eaux internationales. Dans ces eaux, les seules lois applicables sont les lois de la Convention Maritime Internationale.

Une partie des mers et des Océans appartient à un pays mais la plus grande partie n'appartient concrètement à aucun pays en particulier. Raison pour laquelle, dans la Convention Maritime Internationale, il n'y a pas de lois qui y interdisent la culture ou la consommation de cannabis, on peut y surmonter les lois nationales. Ce qui est important, c'est que la récolte se trouve à 44 kilomètres. Le "Bateau de l'avortement" mené par les Women On Waves a utilisé cette idée dans les années 2000. Ce bateau était utilisé pour pratiquer des avortements en mer près de pays où l'avortement était interdit. Si l'embarcation navigue sous pavillon hollandais, la loi appliquée à bord est la loi hollandaise. Comme l'avortement est légal dans les Pays Bas, les avortements à bord étaient autorisés quand le bateau atteignait les eaux internationales. Bien entendu, cela a soulevé un débat passionné et des pressions au niveau international. Mais l'équipage du bateau ne pouvait pas être accusé d'actes illégaux.
C'est le certificat d'enregistrement qui détermine le pavillon sous lequel navigue une embarcation et quelles lois lui sont applicables. Il s'agit d'un document par lequel un pays autorise que l'embarcation navigue sous son pavillon et ses lois. Le bateau paie pour cela une sorte d'impôt. Il suffit qu'une embarcation sollicite un certificat d'enregistrement à un autre pays avec une législation plus favorable et qu'elle paye les impôts.

Par conséquent, pour cultiver en mer, il faut naviguer avec une embarcation qui a un certificat d'enregistrement d'un pays où la culture du cannabis est légale ou du moins, permise. Malheureusement, ce n'est pas facile de trouver ce genre de pays. Dans certaines régions d'Inde, la culture du cannabis est permise. Le gouvernement Indien, cependant, nie que la culture est permise mais de fait, elle se fait à grande échelle. Dans les Pays Bas, il y a une politique de tolérance et la culture de cinq plantes maximum n'est pas poursuivie, même si ça reste illégal. De la même façon, il y a des pays sud-américains qui sont assez flexibles en matière de cannabis: l'Argentine, la Colombie, le Pérou, l'Uruguay et le Venezuela permettent la détention de petites quantités de cannabis. Mais en vérité, il n'existe aucun pays dans le monde où il est légalement permis de cultiver du cannabis.
Que se passerait-il si un bateau naviguait sans certificat d'enregistrement? En théorie, le bateau ne serait tenu par aucune loi national d'aucun pays, uniquement aux lois maritimes internationales. Mais alors, le bateau resterait également sans la protection d'un pays. Bien entendu, il n'aurait pas d'obligation mais pas non plus de droits. Ce serait un régal pour les pirates ou pire: n'importe quel pays pourrait saisir le bateau sans conséquence. Des pays comme la Russie, les Etats Unis d'Amérique ou la Chine sont capables de faire ça sans problème.

Carlos et le Spliffboat

Bien entendu, on peut toujours avoir recours à des pays moins stables dont le chef d'état peut être convaincu de relâcher la norme en échange d'une petite "faveur". Un pays comme la Corée du Nord ou le Venezuela, dont les chefs prêtent peu d'attention au reste du monde et ont adapté leurs lois juste pour provoquer d'autres pays.

Pour savoir comment ça fonctionne, nous avons rencontré un entrepreneur vénézuélien appelé Carlos. Il a décidé d'acheter un bateau pour partir en mer et cultiver de l'herbe à l'intérieur. Il a obtenu l'accord président actuel, Hugo Chavez, pour cultiver l'herbe légalement simplement en s'engageant à jeter l'ancre le long de la côte américaine. Chavez le lui a permis parce qu'il maintient une guerre de mots contre les EU. C'est ainsi que Carlos peut cultiver son cannabis en mer en toute tranquillité. Evidemment, l'armada étasunienne surveille son bateau en permanence pour que pas un seul gramme de cannabis quitte son bateau. Et bien sûr, cette armada à le droit d'intervenir s'il y a suspicion de trafic de cannabis.

Carlos a trouvé une solution simple: si l'herbe ne peut pas être envoyée aux USA, les USA devront venir à l'herbe. Il a ainsi transformé tout le bateau et a installé une plateforme pour hélicoptère dans l'idée de pouvoir recevoir des gens à bord. Il a également construit un bar dans lequel les passagers peuvent fumer et boire. Comme aucune régulation n'est applicable, Carlos a également ouvert un casino où les passagers peuvent jouer librement sans impôts; ainsi qu'un ciné où l'on peut voir les dernières stars. Il a aménagé des chambres d'hôtels pour les invités qui souhaitent rester plus longtemps pour récupérer de leurs excès de la veille. Supposons que tu habites à New York et que tu as envie de passer une bonne nuit à fumer: il suffit que tu aies au Spliffboat en hélicoptère ou en canot rapide et tu pourras fumer légalement un bon joint de marijuana une heure plus tard. Tous les visiteurs sont enregistrés lorsqu'ils quittent le bateau et il est interdit d'emporter du cannabis; si cela arrivait, la marine des USA aurait un motif pour intervenir, car ce serait un cas de trafic.

Il paraît évident que cette entreprise ne pouvait pas opérer de cette manière pendant très longtemps. A la longue, les médias ont crée une pression internationale énorme pour en finir avec le bateau. Les américains - contrevenants aux règles - ont intenté un procès contre le bateau. Sur base de l'histoire récente des USA, ils ont pu le faire sans rencontrer aucune difficulté. Avant ou après, l'opération de culture sera annulée par les vénézuéliens à cause de la pression nationale et internationale, probablement.

Investigations scientifiques

Carlos a décidé de rompre les liens avec le président vénézuélien. En fait, voilà ce qui s'est passé: il a pu cultiver de l'herbe avec comme excuse le but de servir la recherche scientifique. Les baleiniers japonais ont utilisé le prétexte de recherche scientifique pendant des années pour pouvoir chasser les baleines. Personne n'a rien pu faire contre eux parce qu'il y a diverses exemptions dans la loi maritime pour la recherche scientifique dans les eaux internationales. Aujourd'hui, ces "scientifiques" n'en font qu'à leur tête.

Pour suivre cette idée, Carlos s'est arrangé avec Greenpeace: ils ont réussi à mettre en place l'expérience" pour lui. L'herbe allait être cultivée sur un bateau de Greenpeace. Ils ont inventé toutes sortes d'objectifs scientifiques stupides pour justifier l'expérimentation, comme ça a été fait pour la chasse aux baleines. Et de même que dans le cas des "recherches" sur les baleines, l'objet de la recherche (la plante) ne s'en sort pas à la fin de l'expérience car elle est destinée à une autre fin.
Bien entendu, les plantes ont été livrées par Carlos. Il a pris son Spliffboat et a jeté l'ancre le long des côtes japonaises, près de Tokyo. Comme maintenant Carlos ne cultive plus l'herbe lui-même, il peut naviguer sous le pavillon d'un pays qui permet la détention de petites quantité de cannabis. Greenpeace apporte le cannabis en petite quantité au Spliffboat grâce à quoi, Carlos n'a jamais enfreint la loi qui précise les quantités autorisées légalement. Un séjour sur le Spliffboat est de type All Inclusive pour qu'il n'y ait pas de problème avec la vente directe de cannabis. Avec ce type de commerce, le nom de Greenpeace prend tout à coup une toute nouvelle signification.
La motivation de Greenpeace pour sa collaboration à ce projet était de provoquer le Japon à intenter une action en justice. Leur but, évidemment, était de démontrer qu'il n'y a pas de différence entre leur "crime" et celui de la chasse aux baleines. Carlos pouvait gagner assez bien avec le Spliffboat. Le prix du cannabis au Japon est beaucoup plus élevé qu'ailleurs. La police japonaise estime que le prix d'un gramme de cannabis dans la rue tourne autour de 55 euros. Bien entendu, Carlos avait un arrangement avec Greenpeace et un bon pourcentage de ses bénéfices revenait à la bonne cause. Malheureusement, ce projet ingénieux n'était pas non plus destiné à durer. Carlos a donc cherché une manière encore pour pouvoir cultiver son herbe légalement.

L'île

Comme il devenait quasi impossible de ravitailler le Spliffboat légalement, Carlos a décidé de se chercher une île. Mais il y avait un problème: toutes les îles de la planète se trouvent dans les frontières d'un pays. Comme il n'y a pas un seul pays qui autorise officiellement la culture d'herbe, ces îles ne sont pas très attirantes. Et il n'y a pas une seule île dans les eaux internationales.
Une des seules solutions pour Carlos était de faire lui-même une île. La création d'une île artificielle est à la portée de tout le monde. On en connaît déjà quelques exemples: Flevoland (Pays Bas), l'aéroport de Kansai (Japon) et bien entendu, The World et les îles Palm (Dubaï). Comme l'île devait se trouver long de la côte, il était difficile d'en construire une à base de sable comme ça été fait pour The World et les îles de Palm. En plus, il s'agit d'un travail fort cher car il faut aussi construire des digues et des brise-lames pour empêcher que la nouvelle terre soit balayée.

Pour toutes ces raisons, la meilleure alternative était de construire une île flottante. Les premières îles flottantes ont été construites par les Aztèques et appelées Uros. Ces Uros étaient composés de ballots de paille, de joncs et de terre empilée par-dessus. On pouvait y construire des camps tout entier ainsi que de petits villages. Le grand avantage de ce type d'île, c'est qu'il n'y a pas besoin d'arroser les plantes; les racines peuvent simplement pousser là où il y a de l'eau. Le problème, c'est que les joncs pourrissent lentement et qu'il faut régulièrement les remplacer. Mais ce type d'île est une bonne idée pour mener une opération de culture sauvage en eau douce.

Avant de sillonner les mers avec le Spliffboat, Carlos avait déjà fait ce genre de tapis flottants; il est allé ramasser les joncs au même endroit. Il a répandu de la terre préalablement mélangée à du fumier de vache sur les tapis de joncs flottants. Sur cette île artificielle, il a planté des variétés mexicaines et colombiennes. Le périmètre extérieur de l'île flottante a été caché par les joncs qui poussaient et l'herbe est restée à l'abri des regards.

Pour s'assurer que personne de la côte ne pourrait trouver son île, Carlos l'a amarrée à l'extrémité la plus éloignée du lac. De cette manière, l'île est restée au milieu du lac. Grâce à l'isolement du lieu et à sa petite taille, aucun bateau ne traverse jamais le lac. Quand Carlos voulait aller à l'île, il lui suffisait de tirer sur les amarres pour approcher l'île du bord. Cette île est l'endroit idéal pour une culture sauvage. Mais Carlos voulait plus; il voulait cultiver du cannabis légalement et le vendre à l'échelle internationale.
L'utilisation d'uros en mer n'est pas une option sérieuse. Pour commencer, le cannabis ne peut pas pousser sans eau douce; et deuxièmement, l'île devrait être vachement résistante pour supporter les coups de la mer. C'est pourquoi il reste très peu d'exemple d'îles flottantes qui existent toujours. Néanmoins, Carlos a pensé qu'il pourrait mettre en pratique l'idée de Richie Sowa; cet américain qui a construit une île flottante avec des bouteilles en plastique vides. Il a fixé les bouteilles entre elles avec du fil de pêche et fabriqué une structure en bambou au dessus des bouteilles. Sur cette structure, il a répandu de la terre. Aujourd'hui, cette île est couverte de végétation qui lui fournit sa nourriture. A son époque, Richie y avait construit une cabane pour dormir. Il récoltait l'eau de pluie et à l'intérieur, il disposait d'un système pour se laver actionné par le mouvement des vagues. Richie ne vivait pas seul sur cette île: il y avait également un chien, deux chats, deux poules et un canard. Une île pareille intéressait bien sûr Carlos. Mais l'île de Richie se trouvait sur une rivière où les vagues sont beaucoup moins fortes qu'en mer. Pour supporter la houle de la mer, l'île aurait également besoin d'une quille pour l'empêcher de chavirer.

“On peut trouver des plateformes de perforation sur internet pour "seulement" quelques millions d'euros.„

La plateforme de perforation

C'est comme ça que Carlos a commencé à penser qu'il serait plus intelligent d'utiliser une île qui ne flotterait pas. Il a décidé d'essayer la dernière chose possible. Il a acheté une ancienne plateforme de perforation qu'on peut trouver sur internet pour "seulement" quelques millions d'euros. Mais Carlos pouvait se permettre d'acheter une plateforme de perforation grâce aux bénéfices engendrés par le Spliffboat. Ce qui est bien avec ces plateformes, c'est qu'on peut les changer de place et les installer quasi n'importe où.

Dans la législation maritime internationale, il est dit qu'un pays détient le droit exclusif pour installer une plateforme de perforation dans sa propre zone économique (ZEE). Cela signifie que Carlos ne pouvait placer sa plateforme dans n'importe quelle ZEE. Mais comme on peut le voir sur les cartes, il reste beaucoup d'espace pour y installer la plateforme. Comme la plateforme de Carlos venait des Philippines, il a décidé de s'enfoncer en mer au large des côtes de la ZEE japonaise. Comme elle n'appartient à aucun pays, théoriquement, on pourrait la considérer comme un pays avec ses propres lois. Dans ce pays, Carlos pourrait déterminer les lois lui-même, tant qu'elles n'entrent pas en conflit avec la législation internationale.

En principe, tout qui à le temps et l'argent, peut essayer de créer son propre pays. Mais il doit être reconnu par d'autres pays pour être qualifié réellement de pays. Ceci ne fut, probablement, pas possible dans le cas de Carlos au vu des objectifs de son pays.

La plateforme perforée de Carlos n'est pas la seule à prétendre au statut de mini-état. L'exemple le plus connu est le Sealand en mer du Nord qui s'est autoproclamé micro-nation il y a quelques années. Cette île a une histoire émouvante: en 1968, l'armée britannique a été repoussée avec succès par le propriétaire et prince autoproclamé Bates qui a ouvert le feu sur un navire. Le navire n'a jamais réessayé d'accéder à la plateforme? Un groupe de Hollandais et d'Allemands a essayé d'occuper la plateforme en 1978 et a enlevé le fils du prince. Le prince Bates et ses amis ont repris la plateforme et gardé les Allemands prisonniers pendant plusieurs jours comme "prisonniers de guerre".
Afin de garder le contrôle sur sa plateforme, Carlos devra s'attirer au minimum l'attention des médias et être préparé à lutter pour son pays plateforme. S'il y arrive, il pourra approvisionner en secret le Spliffboat.

Je ne serais pas surpris que Carlos existe réellement...

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